Les migrants, y compris les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays, sont des personnes éloignées de leur région ou pays d'origine, qui font souvent face à de nombreuses difficultés pour jouir de leur droit à l'éducation. En raison de leur situation de migration - forcée ou non - la scolarisation des enfants et des adolescents est souvent perturbée.

Les raisons qui poussent des individus à migrer sont multiples et variées, elles peuvent être motivées par la recherche de meilleures conditions de vie et de travail due à la pauvreté, à l'insécurité personnelle, ou aux conflits, à la dégradation de l'environnement ou d'autres violations des droits de l'Homme. Les trajectoires migratoires peuvent être longues et dangereuses au cours desquels les enfants n'ont généralement pas accès à l'éducation. Pourtant, l'éducation est essentielle pour tous les jeunes, non seulement pour leur apporter une certaine forme de stabilité dans leur vie quotidienne, mais aussi pour les doter de compétences et de connaissances nécessaires pour se développer individuellement, faciliter la jouissance d'autres droits et ainsi participer efficacement à la société.

Selon le droit international, les États d'accueil et/ou de transit ont l'obligation de donner accès à une éducation de qualité aux enfants migrants, et quel que soit leur statut migratoire, se fondant sur les principes fondamentaux de droits l'Homme que sont la non-discrimination et l'égalité.  

 

Données principales sur la migration et l'éducation
© RTE

Selon l'Organisation internationale pour les migrations, un migrant désigne "toute personne qui quitte son lieu de résidence habituelle pour s’établir à titre temporaire ou permanent et pour diverses raisons, soit dans une autre région à l’intérieur d’un même pays, soit dans un autre pays, franchissant ainsi une frontière internationale."

La migration est soit internationale soit nationale, volontaire ou involontaire/forcée et les migrants peuvent être soit en situation régulière ou irrégulière. Notez que l’OIM définit un migrant en situation irrégulière, comme une “personne qui franchit ou a franchi une frontière internationale sans autorisation d’entrée ou de séjour dans le pays en application de sa législation ou d’accords internationaux dont il est partie”, l’irrégularité migratoire ne dispense pas pour autant un État de respecter ses obligations de protection des droits de l’Homme des personnes concernées. 

Les réfugiés ont un statut juridique spécifique protégé par le droit international ou national. La Convention relative au statut des réfugiés définit un réfugié comme une personne qui, "craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays".

Un demandeur d'asile est une personne qui demande la protection en tant que réfugié et qui attend toujours que sa demande soit examinée.

Les Principes directeurs du HCR sur les déplacements internes et la Convention africaine de Kampala définissent les personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays comme "des personnes ou des groupes de personnes qui ont été forcés ou contraints à fuir ou à quitter leur foyer ou leur lieu de résidence habituel, notamment en raison d'un conflit armé, de situations de violence généralisée, de violations des droits de l'Homme ou de catastrophes naturelles ou provoquées par l'Homme ou pour en éviter les effets, et qui n'ont pas franchi les frontières internationalement reconnues d'un Etat."

Des statuts migratoires qui peuvent se confondre 

Il est très difficile de classer les migrants dans des catégories spécifiques, car leurs raisons de partir, ainsi que leur statut juridique et les droits correspondants, peuvent évoluer avec le temps. La situation migratoire d'une personne peut donc entrer dans différentes catégories en même temps.

Par exemple, les migrants internes comprennent à la fois les personnes qui sont forcées de déménager (les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays) et les personnes qui ont choisi de s'établir dans un nouveau lieu de résidence pour des raisons économiques (travailleurs migrants internes) ainsi que pour des raisons culturelles (nomades et pasteurs).

La migration forcée ne concerne pas seulement les réfugiés et les demandeurs d'asile, mais aussi les personnes contraintes de se déplacer en raison de facteurs externes auxquels ils sont soumis, tels que les projets de développement ou bien les catastrophes environnementales (avec l’exemple des "réfugiés climatiques"). Notez que le terme "réfugiés climatiques" ne figure pas dans le droit international. Même s'il n'a pas été officiellement reconnu, des institutions telles que l'Union européenne ont exprimé une inquiétude croissante et ont pris des mesures pour soutenir et développer la résilience des pays potentiellement touchés par le changement climatique. Certains recommandent l'utilisation de "migrants climatiques" (en anglais).

En outre, même si elles ont fui pour des raisons similaires à celles des réfugiés, les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays restent légalement sous la protection de leur gouvernement national, tant qu’elles restent sur le territoire national – et ce, même si le gouvernement est la cause de leur fuite. Leur statut juridique et les droits qui y sont attachés sont donc différents de ceux des demandeurs d'asile et des réfugiés.

Le cadre juridique international garantit le droit à l'éducation des migrants, quel que soit leur statut juridique ou migratoire, il se fonde sur les principes de droits de l’Homme d’égalité et de non-discrimination. 

Des informations plus détaillées sur les différentes catégories de migrants figurent dans le document de RTE : Le statut du droit à l'éducation des migrants : cadre juridique international, les obstacles qui subsistent au niveau national et les bons exemples de mise en œuvre par les États (en Anglais)

 

Lois discriminatoires

Le droit international garantit à chacun le droit à l'éducation, indépendemment de sa nationalité, son ethnicité, son genre, son orientation sexuelle, son statut migratoire ou son lieu de résidence. Toutefois, dans certains États, la législation sur l'accès à l'éducation reste discriminatoire et restrictive pour les migrants. La citoyenneté nationale peut être une condition préalable pour être scolarisé, les migrants sans papiers sont souvent exclus, ou encore le droit à l'éducation peut être refusé aux migrants s'ils n'ont pas de statut de résident.

Ces lois nationales sont contraires au droit à la non-discrimination et mettent en danger de nombreux enfants, en particulier les enfants de migrants sans papiers qui sont particulièrement vulnérables.

Protection temporaire

La protection des enfants migrants est souvent de courte durée et temporaire. Par exemple, au sein de l'Union européenne, les mineurs non accompagnés, une population particulièrement vulnérable à l'exploitation et aux violences sexuelles, bénéficient d'une protection temporaire qui expire généralement à l'âge de 18 ans, et cela même s'ils sont scolarisés et intégrés dans la société d'accueil. 

Exigences en matière de documentation

La demande aux familles et aux enfants de documents spécifiques pour pouvoir s'inscrire à l'école va également à l'encontre du droit à la non-discrimination. Ces restrictions mettent en évidence un écart considérable entre les pratiques nationales et les engagements des États à respecter le cadre juridique international des droits de l'Homme.

Des preuves de résidence, des documents liés à la migration ou des certificats de naissance sont souvent demandés pour s’inscrire à l'école, mais en raison de voyages longs et périlleux, de nombreux migrants ne sont bien sûr pas en possession de ces documents et se voient donc refuser l'accès à l'éducation.

Détention

Les familles de migrants sans papiers et leurs enfants, ainsi que les mineurs non accompagnés sans papiers, sont souvent soumis à une détention dans les zones de transit et aux frontières. Dans ces conditions, leur droit à l'éducation n'est pas respecté, souvent justifié à tort en raison du caractère temporaire ou exceptionnel de leur séjour (GEMR, 2019). Le droit international stipule que les enfants migrants non accompagnés ou séparés ne devraient pas, en règle générale, être détenus uniquement pour des raisons d'immigration, sauf si cela peut être exceptionnellement justifié par d'autres motifs. Si les enfants sont détenus, ils ont le droit d'accéder à l'éducation qui devrait, idéalement, avoir lieu en dehors des lieux de détention afin de faciliter la poursuite de leur éducation après leur libération (article 37 de la Convention relative aux droits de l'enfant, Observation générale n° 6, paragraphes 61-63). Par conséquent, il est clair que les Etats ont l'obligation, si la détention est inévitable, de fournir et de garantir l'accès à l'éducation.

Autres obstacles

D'autres pratiques peuvent entraver le droit des enfants migrants à l'éducation :

  • le manque d'installations éducatives ou la fermeture d'écoles en raison de conflits armés ou de désastre national
  • le manque d'accès à l'information sur le droit à l'éducation : de nombreuses familles ou mineurs non accompagnés ne connaissent pas leurs droits, ce manque d'information peut entraver leur inscription dans les établissements scolaires
  • l'inaccessibilité géographique des écoles
  • les frais de scolarité et autres coûts : même si en principe les parents ne doivent pas payer de frais de scolarité (en gardant à l'esprit que l'enseignement primaire doit être gratuit pour tous les enfants et progressivement disponible au niveau secondaire), nombreux sont ceux qui ne peuvent pas se permettre d’assurer les coûts indirects liés à l'envoi de leurs enfants à l'école, par exemple, le transport, l'uniforme, le matériel scolaire et le déjeuner
  • la langue d'enseignement : les migrants sont souvent confrontés à des difficultés pour recevoir un enseignement dans leur langue maternelle, ils peuvent avoir plus de difficultés pour s'adapter et apprendre dans la société d’accueil
  • le manque d'enseignants qualifiés et expérimentés, et autres types d’aides nécessaires : de nombreux systèmes éducatifs ne disposent pas des ressources nécessaires pour s'adapter aux besoins d'apprentissage spécifiques de cette population afin de lui assurer une éducation de qualité. Notamment, d’assurer la lutter contre la discrimination et les comportements nuisibles tels que le harcèlement scolaire qui comprettent un cadre scolaire inclusif et découragent les enfants migrants et leurs familles d'accéder à l'éducation.

Tous ces obstacles peuvent également avoir un impact négatif sur leur intégration sociale.

Vous trouverez des informations plus détaillées sur les différents obstacles auxquels les migrants font face dans le document de RTE :  Le statut du droit à l'éducation des migrants : cadre juridique international, les obstacles qui subsistent au niveau national et les bons exemples de mise en œuvre par les États (En Anglais).

Ce document comprend également des exemples intéressants de mise en œuvre du droit à l'éducation au niveau national, notamment :

  • L'accueil des réfugiés et des demandeurs d'asile malgré le contexte économique et politique difficile du pays

  • La mise en place de lois et politiques inclusives et non discriminatoires

  • Des mesures visant à faciliter l'éducation des nomades

  • Des mesures visant à garantir le libre accès à l'éducation

  • Des mesures visant à faciliter la scolarisation des migrants

  • Des mesures visant à faciliter l'intégration des migrants en s'adaptant à leurs besoins spécifiques, y compris des cours de langue et des programmes spécifiques

Les principes de droits de l'Homme de non-discrimination et d'égalité 

Les instruments internationaux et régionaux qui garantissent le droit à l'éducation pour tous s'appliquent également aux migrants, quel que soit leur statut juridique ou migratoire, sur la base des principes de droits de l'Homme d'égalité et de non-discrimination .

Les États ont comme obligation immédiate de respecter les principes d'égalité et de non-discrimination, notamment pour assurer l'accès et la jouissance du droit à l'éducation. Ils  doivent veiller à ce que leurs lois, règlements et pratiques administratives ne soient pas discriminatoires à l'égard des migrants.

Cela a été réaffirmé par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, dans son Observation générale n° 20 sur la non-discrimination en matière de droits économiques, sociaux et culturels (paragraphe 30.), par le Comité des droits de l'enfant, dans l’Observation générale n° 6 (paragraphe 12 et 41) et l’Observation générale conjointe n° 22 (paragraphes 9 et 22).

‘[...]Le principe de non-discrimination énoncé dans la Convention relative aux droits de l’enfant oblige les États parties à respecter et garantir les droits énoncés dans la Convention pour tous les enfants, qu’ils soient considérés, notamment, comme des migrants en situation régulière ou irrégulière, des demandeurs d’asile, des réfugiés, des apatrides et/ou des victimes de la traite, y compris lorsqu’ils sont renvoyés ou expulsés vers leur pays d’origine, quels que soient la nationalité de l’enfant ou de ses parents ou tuteurs et leur statut migratoire, et que l’enfant et ses parents ou tuteurs soient ou non apatrides.’ (Comité des droits de l’enfant, Observation générale conjointe n° 22, paragraphe 9)

‘[...] Tout enfant non accompagné ou séparé, sans considération de son statut, doit avoir pleinement accès à l’éducation dans le pays dans lequel il est entré.... Cet accès devrait être accordé sans discrimination et, en particulier, les filles séparées ou non accompagnées doivent jouir de l’égalité d’accès à l’éducation formelle et informelle, y compris à tous les niveaux de la formation professionnelle.[...]’, (Comité des droits de l’enfant, Observation générale n° 6, paragraphe 41) 

Dispositions spécifiques applicables à certaines catégories de migrants

En addition au cadre international général protégeant le droit à l’éducation pour tout individu fondé sur les principes d’égalité et de non discrimination, des instruments internationaux et régionaux sont spécifiquement dédiés aux situations de migration. Ils contiennent des dispositions spécifiques à certaines catégories de statut migratoire. Ces instruments permettent de renforcer le cadre légal déjà fourni par les principaux instruments relatifs aux droits de l'Homme.

Le droit à l'éducation des migrants est spécifiquement protégé par la Convention sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, qui garantit leur accès à l'éducation sur la base de l'égalité de traitement avec les nationaux.

Le droit à l'éducation des réfugiés est spécifiquement garanti par la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés, qui stipule que les réfugiés doivent bénéficier du même traitement que les nationaux en ce qui concerne l'enseignement élémentaire et d'un traitement aussi favorable que possible en ce qui concerne les autres niveaux d'enseignement (articles 22 et 29). La convention protège également les droits des demandeurs d'asile puisqu'ils ont fait une demande de protection internationale, ils sont protégés jusqu'à ce qu'une décision soit prise.

Il n'existe pas de convention pour les personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays équivalente à la Convention sur les réfugiés de 1951 au niveau international. Mais au niveau régional, l'Union africaine a adopté la Convention de 2009 sur la protection et l'assistance aux personnes déplacées à l'intérieur de leur propre pays (Convention de Kampala), qui stipule que  "Fournir aux personnes déplacées, dans la plus large mesure possible et dans les plus brefs délais, l’assistance humanitaire adéquate, notamment […] l’éducation, et tous autres services sociaux nécessaires" (article 9.2.b). Dans les situations de conflit armé, les personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont également protégées par le droit international humanitaire. En 1998, les Nations unies ont élaboré des Principes directeurs sur les déplacements internes, qui réaffirment et compilent les droits de l'Homme et le droit humanitaire applicables aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays. Le principe 23 concerne leur droit à l'éducation.   

Vous trouverez des informations plus détaillées sur le cadre légal international du droit à l’éducation des différentes catégories de migrants dans le document de RTE :  Le statut du droit à l'éducation des migrants : cadre juridique international, les obstacles qui subsistent au niveau national et les bons exemples de mise en œuvre par les États (en Anglais) et dans le document Instrument internationaux - le droit à l’éducation des migrants, réfugiés et personnes déplacées à l'intérieur de leur propres pays

 
 

Le cadre des ‘4A’ s’applique également aux migrants, cela répond à l’enjeu de leur garantir à la fois le droit d'accéder à l'éducation (la rendre disponible et accessible) et le droit de recevoir une éducation de bonne qualité (la rendre acceptable et adaptable).            

À disposition : les États doivent veiller à ce que les écoles publiques aient des places disponibles pour accueillir les migrants. Dans un contexte de camps de réfugiés, les États, en coopération avec la communauté internationale, doivent fournir des écoles provisoires.

Accessibilité : les écoles doivent rester physiquement et économiquement accessibles. Les États doivent veiller à ce que le transport soit assuré pour les enfants qui en ont besoin et que les autres coûts, y compris les frais de scolarité s'ils sont imposés, soient abordables, ou soient subventionnés à 100 % suivant le cas échéant. Les États doivent également faciliter l'accès aux écoles et aux universités, même en l'absence des documents normalement requis.  

Acceptabilité : La qualité de l'éducation doit être de bon niveau et être la même partout, tant pour les nationaux que pour les migrants.Les programmes et les méthodes d'enseignement doivent être appropriés et de bonne qualité. En particulier dans les situations d'urgence (conflits armés, camps, déplacements, etc.), il est fréquent que les enfants migrants n'aient accès qu'à une éducation informelle ou de moindre qualité qui ne répond pas toujours aux normes minimales d'éducation. 

Adaptabilité : il s’agit d’un enjeu majeur pour les enfants en situation de migration. Si nécessaire, les classes peuvent être mobiles ou provisoires. Quelle que soit l'approche adoptée, elle doit prendre en considération autant que possible les besoins et la vulnérabilité de l'enfant. Elle peut également exiger des États qu'ils offrent des classes dans la langue maternelle, dans la mesure du possible, ou des cours de langue pour favoriser leur intégration. 

Vous trouverez des informations plus détaillées sur le contenu du droit à l’éducation des différentes catégories de migrants dans le document de RTE :  Le statut du droit à l'éducation des migrants : cadre juridique international, les obstacles qui subsistent au niveau national et les bons exemples de mise en œuvre par les États (n Anglais).

Le droit international garantissant le droit à l’éducation comprend des traités créant des obligations contraignantes pour les États signataires. D’autres sources de droit sont non contraignantes comme les déclarations, les résolutions, les plans d’action, les principes directeurs ainsi que les interprétations juridiques des comités des traités des Nations Unis (recommandations et observations générales). 

Dispositions générales sur le droit à l'éducation et à la non-discrimination

Cadre international 
Cadre régional africain 
Cadre régional européen
Cadre régional inter américain 
Cadre régional arabe 
Cadre régional asiatique 

Disposition spécifiques applicables à certaines catégories de migrants 

Cadre international contraignant 
Cadre international non contraignant  
Cadre régional africain  
Cadre régional africain non contraignant
Cadre régional européen 

Pour plus d’information sur le contenu des textes ci-dessus, consultez le document Instrument internationaux - le droit à l’éducation des migrants, réfugiés et personnes déplacées à l'intérieur de leur propres pays