Diverses minorités et peuples autochtones existent à travers le monde. Ce qu’ils ont en commun est de souvent faire face à des discriminations, marginalisations et exclusions.

Le droit international des droits de l’Homme, fondé sur le principe d’égalité, garantit le droit de toute personne à l’éducation. Et pourtant, les minorités et peuples autochtones  ont plus de probabilité de se voir dénier leur droit à l’éducation. Selon un Rapport (en anglais) de Minority Rights Group International (2009, p. 13), la majorité des enfants qui ne sont pas à l’école dans le monde sont issus de minorités ou peuples autochtones. Les enfants issus de minorités et peuples autochtones sont également régulièrement privés d’un accès à une éducation de qualité qui soit pertinente et adaptée à leurs besoins et contexte spécifiques.

A cette fin, le droit international des droits de l’Homme identifie un certain nombre de dimensions individuelles et collectives du droit à l’éducation. Cela inclut la reconnaissance du besoin de mesures spécifiques pour la réalisation du droit à l’éducation des minorités et peuples autochtones. Néanmoins, afin que la protection garantie par le droit international puisse être engagée, les minorités et peuples autochtones doivent être en mesure de se prévaloir du statut de minorité ou peuples autochtones.

Il n’y a pas de définition précise de « minorité » en droit international. Toutefois, le système des Nations Unies reconnait les minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques et le droit des personnes appartenant à ces groupes d’avoir, en commun avec les autres membres de leur groupe, leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion, ou d’employer leur propre langue (article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; article 2 de la Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques).

Bien que l’article 27 identifie les minorités auxquelles il s’applique, il n’offre pas de définition de ce qui constitue une « minorité ». Aucune définition unique ne pourrait embrasser l’ample diversité de groupes existants dans le monde. Néanmoins, certaines caractéristiques communes peuvent être identifiées. En particulier, les groupes minoritaires partagent souvent les caractéristiques suivantes :

  • une position non-dominante ou marginale par rapport au reste de la population
  • des caractéristiques ethniques, religieuses ou linguistiques distinctes de celles du reste de la population
  • un désir de préserver leur culture, traditions, langue ou religion distincte

Le Comité des droits de l’Homme explique dans son Observation Générale 23 (para. 5.2) que : « L’existence dans un Etat partie donné d’une minorité ethnique, religieuse ou linguistique ne doit pas être tributaire d’une décision de celui-ci, mais doit être établie à l’aide de critères objectifs. »

En plus du critère « objectif » nécessaire à la définition d’une minorité (tel que décrit dans la liste au-dessus), il y a également un élément subjectif à prendre en compte: les membres doivent eux-mêmes s’identifier comme appartenant à un groupe ethnique, religieux ou linguistique distinct. Cela est important non seulement en raison de l’absence de définition formelle, mais également afin d’éviter que les Etats puissent arbitrairement sélectionner à qui le statut de minorité est reconnu.

Il est également important de souligner que les groupes minoritaires sont généralement numériquement inférieurs à la population majoritaire, mais il n’est pas nécessaire qu’ils le soient pour être correspondent à la définition décrite ci-dessus.

Malgré l’absence de définition communément acceptée du terme de « minorité », il est nécessaire de distinguer les minorités des autres groupes marginalisés. La distinction est importante car l’octroi du statut de minorité entraine l’application d’un corps de règles spécifiques du droit international adaptées au contexte et droits spécifiques des minorités ethniques, religieuses et linguistiques.

Pour plus d’informations, voir le Chapitre 2.1 Marginalised Minorties in Development Programming (PNUD, 2010) (en anglais uniquement).

La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, défendue ardemment par les peuples autochtones, ne contient aucune définition du terme « peuples autochtones ». Ceci à dessein. En effet, les peuples autochtones  ont résisté à l’inclusion d’une définition jugée inutile et indésirable, insistant plutôt sur l’importance de la flexibilité et de l’auto-détermination.

Néanmoins, le droit international identifie certaines caractéristiques propres aux peuples autochtones. L’article 1 de la Convention 169 de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux (1989) prévoit son application « aux peuples dans les pays indépendants qui sont considérés comme indigènes du fait qu’ils descendent des populations qui habitaient le pays, ou une région géographique à laquelle appartient le pays, à l’époque de la conquête ou de la colonisation ou de l’établissement des frontières actuelles de l’Etat, et qui, quel que soit leur statut juridique, conservent leurs institutions sociales, économiques, culturelles et politiques propres ou certaines d’entre elles ».

Le Guide sur la Convention 169 (2009) détaille davantage les caractéristiques des peuples autochtones :

  • une culture, une organisation sociale, une situation économique et un mode de vie qui se distinguent de ceux du reste de la population d’un pays, notamment au niveau des modes de subsistance, de la langue etc.
  • des traditions et coutumes qui leur sont propres et/ou un statut juridique spécial
  • une continuité historique, c’est-à-dire que ce sont des sociétés antérieures à la conquête/colonisation
  • des racines territoriales (leurs ancêtres habitaient déjà le pays ou la région)
  • des institutions sociales, économiques, culturelles et politiques distinctes (ils ont conservé certaines ou toutes leurs institutions)

Comme pour les minorités, l’auto-identification est considérée comme étant un critère fondamental pour déterminer si un groupe est autochtone.

Peuples autochtones et minorités partagent souvent certaines caractéristiques et la distinction entre les deux groupes n’est pas toujours évidente. Les deux groupes :

  • sont généralement dans une position non-dominante
  • leur culture, langue ou croyances religieuses diffèrent généralement de celles de la majorité de la population
  • ils souhaitent généralement conserver et promouvoir leur identité

Dans certains cas, les minorités ont également un attachement fort et ancien à leurs terres. Cependant, les minorités n’ont pas nécessairement ce long attachement ancestral, traditionnel et spirituel à leurs terres associé aux peuples autochtones (Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme, Droit des minorités : Normes internationales et indications pour leur mise en œuvre).

De plus, les peuples autochtones ne sont pas forcement numériquement inferieurs; par exemple, en Bolivie, les groupes autochtones représentent plus de la moitié de la population.

Il est important de noter que les statuts de minorités et peuples autochtones peuvent  souvent se chevaucher, tant entre qu’à l’intérieur des groupes. Des minorités peuvent exister au sein des peuples autochtones ; par exemple, en constituant des sous-groupes ethniques ou linguistiques. Les filles et femmes appartenant à des minorités et peuples autochtones font souvent face à des discriminations supplémentaires. C’est également le cas des personnes handicapées en raison des différents aspects de leurs identités. Ces formes de discriminations peuvent interagir de manière complexe; c’est ce qu’on appelle la discrimination inter-sectionnelle.

Le Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention internationale relative aux droits de l’enfant garantissent le droit individuel de chacun à l’éducation. Néanmoins, les droits individuels, y compris le droit à l’éducation, tel qu’énoncé dans le PIDESC et la CDE, qu’il soit exercé individuellement ou collectivement, ne répond pas toujours de manière adéquate au contexte, préoccupations et besoins spécifiques des minorités et peuples autochtones. Reflétant cela, l’article 30 de la CDE et l’article 27 du PIDCP garantissent le droit spécifique de toute personne appartenant à des communautés minoritaires ou autochtones le droit d’avoir, en commun avec les autres membres de leur groupe, leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion ou d’employer leur propre langue.

Pour les minorités et les peuples autochtones, l’éducation est un des moyens clef par lequel les pratiques culturelles, les langues et les valeurs sont transmises d’une génération à la suivante. Pour les peuples autochtones, cela requiert que le droit à l’éducation soit formulé d’une manière qui protège le groupe dans son ensemble. Le droit à l’éducation prend alors une dimension collective, à travers le droit de contrôler–ou avoir son mot à dire quant à–la manière dont l’éducation est délivrée : son contenu, ses méthodes, ses valeurs, ses objectifs et la langue d’instruction. Dans le cadre spécifique des peuples autochtones, l’article 14 para. 1 de la Déclaration des droits de peuples autochtones (1992) leur reconnait le droit d’établir et de contrôler leurs propres systèmes et établissements scolaires où l’enseignement est dispensé dans leur propre langue, d’une manière adaptée à leurs méthodes culturelles d’enseignement et d’apprentissage.

Les minorités ont également un droit à l’autonomie éducative, mais celui-ci est moins clairement formulé par le droit international des droits de l’homme. Selon le paragraphe 6.2 de  l’Observation Générale 23 (1994) du Comité des droits de l’Homme des Nations Unies : « Bien que les droits consacrés à l’article 27 soient des droits individuels, leur respect dépend néanmoins de la mesure dans laquelle le groupe minoritaire maintient sa culture, sa langue ou sa religion. En conséquence, les Etats devront également parfois prendre des mesures positives pour protéger l’identité des minorités et les droits des membres des minorités de préserver leur culture et leur langue et de pratiquer leur religion, en commun avec les autres membres de leur groupe ». Couplé au droit de participer aux décisions qui les affectent–un principe général du droit international des droits de l’Homme–en pratique, cela signifie que ce droit est reconnu à travers des mécanismes collectifs tels que des comités consultatifs, des représentants politiques élus, etc.

Pour une liste détaillée des dispositions du droit international relatives aux minorités et peuples autochtones, voir Instruments Internationaux : Les minorités et les populations autochtones.

Pour le cadre normatif complet relatif au droit à l’éducation, voir Instrument Internationaux : le droit à l’éducation

Les accordéons ci-dessous explique les défis les plus communs auxquels doivent faire face les minorités et peuples autochtones au regard de leur droit à l’éducation, ainsi que les dispositions pertinentes du droit international des droits de l’Homme. Cette liste ne prétend pas être exhaustive.

La conséquence des défis auxquels les minorités et peuples autochtones font face n’est pas seulement qu’ils ne jouissent pas de leur droit à l’éducation, mais également qu’ils se voient privés des bénéfices de l’éducation. Les étudiants issus de minorités et peuples autochtones ont des résultats en matière d’éducation inférieurs au reste de la population. De ce fait, les enfants issus de minorités et peuples autochtones font face à des obstacles réduisant leurs possibilités de poursuivre des études supérieures et accéder à des emplois rémunérateurs.

Le manque d’une éducation de bonne qualité perpétue le cycle d’exclusion et de marginalisation. Les étudiants ne peuvent atteindre des positions clefs au sein du gouvernement ou du marché du travail, y compris devenir professeurs, perpétuant la sous-représentation politique et économique des minorités et peuples autochtones.

De plus, la capacité des enfants appartenant à des minorités et peuples autochtones à jouir de leurs autres droits de l’Homme est compromise. Le droit à l’éducation est un « droit multiplicateur », qui facilite la jouissance d’autres droits de l’Homme, tels que le droit à la liberté d’expression et à la santé, et prévient le travail et le mariage des enfants.

Les étudiants appartenant à des minorités et peuples autochtones font souvent face à des discriminations dans l’accès à une éducation de qualité. Les politiques étatiques, qu’elles soient officielles ou de facto, telles que la ségrégation des écoles et salles de classe, empêchent souvent l’égal accès des étudiants issus de minorités et peuples autochtones  à une éducation de qualité. A titre d’exemples nous pouvons citer : l’apartheid en Afrique du Sud, la ségrégation raciale aux Etats-Unis, le traitement des enfants roms en Europe et des Dalits ou intouchables en Inde (caste inferieure). De plus, la ségrégation de facto qui résulte de disparités socio-économiques peut être tout aussi dommageable que des politiques officielles. Le droit international des droits de l’Homme prohibe les discriminations officielles et de facto par des clauses d’égalité et de non-discrimination présentes dans presque tous les traités relatifs aux droits de l’homme, dont :

Certains Etats discriminent activement les minorités et peuples autochtones dans les manuels et programmes scolaires, à travers la perpétuation de stéréotypes et des représentations injustes ou biaisées. Ces pratiques violent le droit des étudiants issus de minorités ou peuples autochtones à l’éducation et la non-discrimination, par exemple l’article 31 de la Convention 169 de l’OIT selon lequel : « Des mesures de caractère éducatif doivent être prises dans tous les secteurs de la communauté nationale, et particulièrement dans ceux qui sont le plus directement en contact avec les peuples intéressés, afin d’éliminer les préjugés qu’ils pourraient nourrir à l’égard de ces peuples. A cette fin, des efforts doivent être faits pour assurer que les livres d’histoire et autres matériels pédagogiques fournissent une description équitable, exacte et documentée des sociétés et cultures des peuples intéressés. »

Plus largement, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones  requiert des Etats qu’ils reflètent fidèlement la diversité des cultures des peuples autochtones dans l’enseignement et les moyens d’informations, et qu’ils prennent « des mesures efficaces, en consultation et en coopération avec les peuples autochtones concernés, pour combattre les préjugés et éliminer la discrimination et pour promouvoir la tolérance, la compréhension et de bonnes relations entre les peuples autochtones et toutes les autres composantes de la société » (article 15). 

Les Etats peuvent également entraver l’égal accès à l’éducation en manquant d’établir des écoles de qualité à une distance raisonnable de là où les minorités et peuples autochtones vivent. L’Observation Générale 13 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels précise que l’accessibilité physique est une « caractéristique essentielle » du droit à l’éducation. Néanmoins, les étudiants issus de minorités et peuples autochtones  vivent souvent dans des zones rurales ou reculées, résultant en un trajet long et dangereux, qui peut dissuader les étudiants, particulièrement les filles, de s’inscrire. 

Le contenu et les objectifs de l’éducation doivent être adaptés aux besoins et circonstances des étudiants issus de minorités et peuples autochtones. Certains Etats peuvent opérer une politique d’assimilation en enseignant uniquement dans la langue dominante ou majoritaire, en omettant l’enseignement de cultures, histoires, traditions et langues alternatives. Ces politiques peuvent contribuer à rendre invisibles l’identité et la culture des minorités et peuples autochtones, ce qui peut à son tour renforcer et perpétuer les expériences d’exclusion, de dépossession, et de perte d’identité. Cela impacte également de manière négative les performances académiques des étudiants issus de minorités et peuples autochtones, particulièrement pour les tests standardisés, qui présupposent souvent que les étudiants soient intégrés dans une culture particulière et aient une connaissance de la langue dominante.

Par exemple, l’éducation a historiquement été utilisée comme un moyen d’assimiler les peuples autochtones par lequel les Etats coloniaux ont promu la culture de la société dominante tout en interdisant l’usage par les peuples autochtones de leur langue traditionnelle ou la pratique de leur culture traditionnelle. Cela a renforcé l’expérience de la colonisation, étant donné que non seulement les terres des peuples autochtones leurs étaient usurpées, mais aussi leurs langues et cultures.

Dans certains pays, particulièrement au Canada et en Australie, les gouvernements ont établi et exploité des pensionnats ou des internats, soumettant les étudiants issus de peuples autochtones à des abus physiques, psychologiques et sexuels réguliers. Les politiques de ce genre vont au-delà de l’assimilation et visent en réalité à détruire les peuples autochtones  (« génocide culturel » selon la Commission de vérité et réconciliation du Canada).

Une éducation est culturellement pertinente en raison du contenu de son enseignement, mais également de la manière dont cela est enseigné, comme par exemple l’usage de méthodes pédagogiques propres aux peuples autochtones. Cela peut inclure par exemple la participation à des cérémonies traditionnelles pour apprendre les pratiques culturelles (voir en anglais L. King and S. Schielmann, The challenge of indigenous education : practice and perspectives, UNESCO, 2004).

Le droit international des droits de l’homme, dans une certaine mesure, atténue l’assimilation potentielle en permettant aux individus et groupes l’établissement d’institutions éducatives (voir la liberté académique et d’enseignement)–un droit qui s’applique tant aux minorités qu’aux peuples autochtones.

Afin d’assurer l’existence, le développement et le bien-être continu des peuples autochtones en tant que communautés distinctes, l’article 27 de la Convention 169 de l’OIT prévoit que :

  1. Les programmes et les services d'éducation pour les peuples intéressés doivent être développés et mis en œuvre en coopération avec ceux-ci pour répondre à leurs besoins particuliers et doivent couvrir leur histoire, leurs connaissances et leurs techniques, leurs systèmes de valeurs et leurs autres aspirations sociales, économiques et culturelles.
  2. L'autorité compétente doit faire en sorte que la formation des membres des peuples intéressés et leur participation à la formulation et à l'exécution des programmes d'éducation soient assurées afin que la responsabilité de la conduite desdits programmes puisse être progressivement transférée à ces peuples s'il y a lieu.
  3. De plus, les gouvernements doivent reconnaître le droit de ces peuples de créer leurs propres institutions et moyens d'éducation, à condition que ces institutions répondent aux normes minimales établies par l'autorité compétente en consultation avec ces peuples. Des ressources appropriées doivent leur être fournies à cette fin.

L’article 14 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits de peuples autochtones de 2007 réaffirme le droit des peuples autochtones d’établir et de contrôler leur système et institutions éducatives.

Pour davantage d’informations sur les dispositions précitées, voir en anglais J. B. Henriksen, Key Principles in Implementing the ILO Convention No. 169 , 2008, p. 51-54. 

Les minorités et peuples autochtones  parlent souvent une langue qui n’est pas celle de la majorité de la population ou la langue officielle. Ainsi, quand les étudiants issus de minorités ou peuples autochtones  étudient dans une langue qui n’est pas leur langue maternelle, il a été démontré qu’ils sont désavantagés et leur développement éducatif est irrémédiablement affecté (voir en anglais Magga et al., Indigenous Children’s Education and Indigenous Languages (en anglais) les articles de Tove Skutnabb Kangas).

Il a également été démontré que les enfants issus de minorités et peuples autochtones peuvent être dissuadés de s’inscrire à l’école et sont plus enclins à abandonner car leur langue minoritaire n’est pas utilisée pour enseigner. De ce fait, il n’est pas étonnant que l’analphabétisme est typiquement plus présent au sein des communautés minoritaires ou autochtones qu’au sein de la majorité de la population.

Le droit d’apprendre sa langue maternelle (que ce soit la langue d’instruction ou en tant que matière) n’est pas seulement une issue affectant les individus, mais des groupes entiers. La langue est le premier vecteur par lequel les coutumes, les valeurs, la culture ainsi que la langue elle-même sont transmises de génération en génération.

Il est important de noter que l’instruction dans la langue maternelle ne veut pas nécessairement dire que les étudiants issus de minorités ou de peuples autochtones ne devraient pas avoir l’opportunité d’apprendre et maitriser la langue dominante. En fait, il est désirable que les étudiants parlent plusieurs langues, leur permettant de bénéficier de l’éducation majoritaire et accéder à l’emploi, tout en conservant leur héritage linguistique. Quand la langue indigène n’est pas transmise, les programmes de revitalisation linguistique pourraient être intégrés dans le système éducatif (voir l’article 13 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ainsi que le rapport du groupe d’appui inter-organisations sur les questions autochtones).

Le droit international est un peu flou sur les droits linguistiques en matière d’éducation. Néanmoins, les dispositions relatives aux droits de l’homme doivent être lues à la lumière les unes des autres. Ainsi, le droit de participer aux décisions affectant les minorités et peuples autochtones  et le droit à la promotion et à la protection de leur culture et identité peut requérir l’enseignement en langue maternelle comme méthode et de la langue maternelle comme matière. La plus forte protection juridique se trouve dans deux traités du Conseil de l’Europe :

L’article 8 requiert des Etats qu’ils s’engagent, dans le territoire où ces langues sont pratiquées et à tous les niveaux d’enseignement, à prévoir une éducation assurée dans les langues minoritaires ou régionales, ou qu’une part substantielle de l’éducation soit assurée dans les langues minoritaires ou régionales, ou de s’assurer de l’enseignement des langues minoritaires ou régionales. Si un nombre suffisant d’étudiants requièrent l’éducation dans la langue minoritaire, les Etats doivent prendre au moins une des trois mesures précitées.

En vertu de l’article 14 paragraphe 1, les Etats « s’engagent à reconnaître à toute personne appartenant à une minorité nationale le droit d’apprendre sa langue minoritaire ». En vertu du paragraphe 2, « dans les aires géographiques d'implantation substantielle ou traditionnelle des personnes appartenant à des minorités nationales, s'il existe une demande suffisante, les Parties s'efforceront d'assurer, dans la mesure du possible et dans le cadre de leur système éducatif, que les personnes appartenant à ces minorités aient la possibilité d'apprendre la langue minoritaire ou de recevoir un enseignement dans cette langue. ».

Au niveau international, deux traités garantissent les droits linguistiques dans l’éducation :

Son article 28 prévoit que « lorsque cela est réalisable, un enseignement doit être donné aux enfants des peuples intéressés pour leur apprendre à lire et à écrire dans leur propre langue indigène ou dans la langue qui est le plus communément utilisée par le groupe auquel ils appartiennent. Lorsque cela n'est pas réalisable, les autorités compétentes doivent entreprendre des consultations avec ces peuples en vue de l'adoption de mesures permettant d'atteindre cet objectif ».

Cependant, cette Convention s’applique uniquement aux peuples autochtones  et le nombre de ratification est assez faible (22 à ce jour).

Selon son article 5, « il importe de reconnaître aux membres des minorités nationales le droit d'exercer des activités éducatives qui leur soient propres, y compris la gestion d'écoles et, selon la politique de chaque Etat en matière d'éducation, l'emploi ou l'enseignement de leur propre langue ».

Le droit non contraignant prévoit des standards concernant les droits linguistiques en matière d’éducation. Cependant, les deux déclarations ci-dessous ne sont pas juridiquement contraignantes :

Selon l’article 14 §1, « les peuples autochtones ont le droit d’établir et de contrôler leurs propres systèmes et établissements scolaires où l’enseignement est dispensé dans leur propre langue, d’une manière adaptée à leurs méthodes culturelles d’enseignement et d’apprentissage ».

Selon l’article 14 §3, « Les États, en concertation avec les peuples autochtones, prennent des mesures efficaces pour que les autochtones, en particulier les enfants, vivant à l’extérieur de leur communauté, puissent accéder, lorsque cela est possible, à un enseignement dispensé selon leur propre culture et dans leur propre langue. »

L’article 4 prévoit que « Les Etats prennent, le cas échéant, des mesures pour que les personnes appartenant à des minorités puissent exercer intégralement et effectivement tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales, sans aucune discrimination et dans des conditions de pleine égalité devant la loi ».

L’assimilation, l’absence d’enseignement dans la langue maternelle, l’absence d’éducation adaptée aux besoins et contexte des étudiants, ne sont dans certains cas pas directement dus aux politiques étatiques mais plutôt au manque d’enseignants issus de minorités ou de peuples autochtones, d’enseignants formés pour délivrer une éducation dans des langues minoritaires ou de peuples autochtones, et au manque de matériel éducatif adéquat. Ces cas témoignent de l’inaction de l’Etat et de son échec dans la prise de mesures effectives pour assurer une éducation de qualité pour tous.

Par exemple, l’article 27 de la Convention de l’OIT n. 169 de 1989 requiert que les Etats fournissent des ressources suffisantes afin que les peuples autochtones établissent des institutions éducatives. L’article 8 de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires de 1992 requiert des Etats qu’ils assurent aux enseignants une formation leur permettant d’enseigner les langues minoritaires. C’est aussi le cas de l’article 12 de la Convention-cadre de 1995 qui garantit également l’accès aux manuels scolaires.

Pour des lectures complémentaires concernant les droits linguistiques, voir en anglais la page de Fernand de Varenne ainsi que son article dans le bulletin INTERIGHTS. 

Dans de nombreux pays, le taux d’inscription et d’achèvement de l’éducation au sein des enfants issus de minorités et peuples autochtones, particulièrement les filles, sont inférieurs au reste de la population. Une des principales raisons en est la pauvreté, les minorités et peuples autochtones souffrant également de taux de pauvreté supérieurs à la population majoritaire. Pour survivre, de nombreuses familles envoient leurs enfants au travail plutôt qu’à l’école (ce qui est interdit par l’article 17 de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et ceux qui vont à l’école ont davantage de risques d’y aller en ayant faim, en étant fatigués ou malades. Dans certains cas, bien que l’éducation en elle-même soit dispensée gratuitement, des coûts indirects, tels que les manuels scolaires, les uniformes, le transport, et les repas scolaires, demeurent excessivement élevés.

Les minorités et peuples autochtones font souvent face à un retard comparé au degré d’éducation de la majorité de la population. Cela peut être attribué à a) un manque d’école de qualité dans les régions où vivent les minorités et peuples autochtones ; b) des préjugés à la fois dans l’attitude et le comportement des enseignants et dans les programmes scolaires ; c) une insuffisante intégration des langues des minorités. Les école dans les zones où vivent les minorités et peuples autochtones ou qui comptent davantage d’étudiants issus de minorités ou de peuples autochtones sont souvent de moins bonne qualité, peu équipées, inférieures en terme d’infrastructure et employant des enseignants moins qualifiés. Cela est dû au fait que les Etats dépensent en moyenne moins pour l’éducation des minorités et peuples autochtones que pour l’éducation de la majorité de la population. Voir par exemple le rapport (en anglais) de Human Rights Watch, Discrimination against Palestinian Arab Students in Israel’s Schools (2001).

Pour davantage d’informations, voir la partie 2 des Lignes directrices de l’OIT visant à combattre le travail des enfants au sein des peuples indigènes et tribaux (en anglais) (2006) qui identifie les barrières existantes à l’éducation et regarde les besoins et droits spécifiques des enfants autochtones en ce qui concerne l’éducation scolaire et la formation professionnelle.

Les étudiants issus de minorités et peuples autochtones peuvent faire face à des abus et moqueries, au racisme, et ont davantage de chances d’être victime de punitions corporelles et de violence basées sur le genre. Dans certains cas, les professeurs et les personnes disposant d’autorité sont à l’origine de ces violences, ou ne font rien pour les prévenir.

En plus de la violence à l’école, les étudiants issus de peuples autochtones et particulièrement de minorités font face à des violences dues à des conflits, car les conflits contemporains ont souvent une dimension raciale ou ethnique (voir le rapport de l’experte indépendante chargée d’examiner les questions relatives aux minorités, para. 63). Durant les conflits et à la veille des conflits, les minorités sont souvent persécutées, systématiquement discriminées et victimes de discours de haine. Dans certains conflits, les programmes et manuels scolaires sont utilisés afin d’inciter à la haine ou persécuter les étudiants issus de minorités. Les enfants issus de minorités et peuples autochtones ont aussi davantage de probabilités d’être recrutés comme enfants soldats, ce qui est expressément interdit en droit international. Voir Instruments internationaux : âge minimum du recrutement militaire (2014).

Des conflits ou autres situations d’urgence peuvent également perturber l’éducation, par exemple par la destruction d’écoles ou le déplacement de personnes. Pour davantage d’informations, voir les pages sur l’éducation en situations d’urgence et les migrants, réfugiés et personnes déplacées internes.

Pour surmonter la marginalisation, atteindre l’égalité substantielle (en plus de l’égalité formelle), ainsi que promouvoir et protéger l’identité culturelle, les Etats devraient s’abstenir de discriminations et prendre des mesures positives afin de s’assurer de l’égalité en matière d’éducation. En plus, des mesures positives sont souvent nécessaires car les minorités et peuples autochtones  ont souvent souffert de marginalisations et discriminations. Par conséquent, ils sont spécialement vulnérables et souffrent de manière disproportionnée de violations de leurs droits. Toute mesure adoptée doit prendre en compte la situation unique et les intérêts des groupes minoritaires en question. Par exemple, les groupes nomades peuvent avoir besoin d’installations scolaires mobiles ou multiples.

De nombreuses mesures peuvent êtes adoptées par les Etats pour lutter contre les inégalités. Par exemple, les Etats peuvent mettre en œuvre des actions positives par le biais de transferts monétaires. Pour davantage d’exemples, voir les tables 2 à 4 du rapport de Minority Rights Group International (en anglais). Il est également vital que la politique et le droit existant en matière d’éducation ne soient pas indirectement discriminatoires. Voir les affaires Oršuš et autres c. Croatie (2010) et Horvát et Kiss c. Hongrie (en anglais uniquement) (2013).

Il est important de noter que l’inégalité et la discrimination ne se produisent dans n’importe quelles circonstances. Les Etats doivent également s’attaquer à des problèmes sociétaux plus larges tels que la pauvreté, ainsi qu’à des problèmes spécifiques à l’éducation. Les Etats doivent également promouvoir le respect et la compréhension des minorités et peuples autochtones par le public, à travers l’éducation aux droits de l’homme et d’autres mesures adaptées.

Afin que la protection garantie en droit international (voir l’aperçu ci-dessous) puisse être invoquée, les minorités et peuples autochtones doivent être en mesure de se prévaloir du statut de minorité ou de peuple autochtone. 

Instruments internationaux

Voir également son interpretation par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale : Observation générale n. 23 (paragraphe 4); Observation générale n. 27 (paragraphes 17-26); Observation générale n. 29 (paragraphes rr- vv); Observation générale n. 34 (paragraphes 61 – 66)

Voir également son interprétation par le Comité des droits de l'enfant : Observation générale n. 11 (paragraphes 56 à 63); Journée de discussion générale sur les droits des enfants autochtones (en anglais) (paragraphe 19)

Voir également son interpretation par le Comité des droits de l'Homme : Observation générale n. 23 (paragraphes 1 – 9)

Voir également son interpretation le Comité des droits économiques, sociaux et culturels :  Observation générale n. 13 (paragraphes 6 b, 31 et 50); Observation générale n. 20 (paragraphe 10 b et 22)

Pour davantage d’informations, voir le Commentaire sur la Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l'enseignement, Daudet and Eisemann, 2005 (p. 28-31)

Instruments régionaux

Instruments non-contraignant 

Instruments spécifiques sur les droits des peuples autochtones 

Pour davantage d’informations sur la Convention 169 de l’OIT et le droit à l’éducation, voir (en anglais) Key Principles in Implementing ILO Convention No. 169 de J. B. Henriksen, p. 48 à 55.

Notez que les dispositions relatives aux minorités peuvent également s’appliquer aux peuples autochtones.

Instruments spécifiques sur les droits des minorités 

Il n’y a pas de traité juridiquement contraignant relatif aux droits des minorités équivalant à la Convention 169 de l’OIT. Néanmoins au niveau régional, il y a deux instruments applicables en Europe :

Pour davantage d’informations, voir le rapport explicatif de la Charte

Pour davantage d’informations, voir le rapport explicatif

Au plan international, il est également un instrument non-contraignant :

Pour davantage d’informations, voir (en anglais) United Nations Guide for Minorities

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Pour une liste détaillée des dispositions de droit international relatives aux minorités et peuples autochtones, voir Instruments internationaux : Minorités et peuples autochtones et pour le cadre normatif complet relatif au dorit à l'éducation, voir Instruments internationaux : Droit à l'éducation

Accès

Murat Er v Denmark (2007) (en anglais)

Rom

Horváth and Kiss v Hungary (2013) (en anglais)

Lavida et al v Greece (2013) (en anglais)

Sampani et v Greece (2013) (en anglais)

Orsus v Croatia (2010) (en anglais)

D.H. v Czech Republic (2006) (en anglais)

Language

Catan et al v Moldova and Russia (2012) (en anglais)

Belgian Linguistics Case (1968) (en anglais)

Religion

Lautsi v Italy (2011) (en anglais)

Sahin v Turkey (2005) (en anglais)

Tengur v The Minister of Education and Another (2002) (en anglais)