Aujourd’hui plus de filles que jamais vont à l’école. Cependant, malgré des progrès, les femmes et les filles continuent d’être confrontées à de multiples obstacles à la jouissance égale au droit à une éducation de qualité en raison de leur sexe et de l’intersection de ce facteur avec de nombreux autres facteurs, tels que l’âge, l’ethnicité, la pauvreté, et le handicap. Cela inclut des obstacles, à tous les niveaux, pour accéder à une éducation de qualité et au sein de systèmes éducatifs, d’institutions et de salles de classe, tels que, entre autres:

La communauté internationale a reconnu le droit égal à une éducation de qualité pour tous et s’est engagée à parvenir à une égalité sexospécifique dans tous les domaines, dont l’éducation, grâce au consentement du droit international relatif aux droits humains. cela signifie que les États ont une obligation juridique d’éliminer tous les obstacles discriminatoires, qu’ils existent dans la loi ou dans la vie quotidienne, et de prendre des mesures positives pour instaurer l’égalité, aussi bien dans l’accès à, au sein de et par le biais de l’éducation.

Selon les derniers chiffres mondiaux publiés (rapport d’orientation d’ISU/Rapport mondial de suivi sur l’éducation 27/Fiche descriptive 37, 2016: p. 1), 263 millions d’enfants et de jeunes ne vont pas à l’école - ce qui correspond à 19% de l’ensemble des filles et 18% de l’ensemble des garçons.  

Au niveau primaire 61 millions d’enfants ne sont pas scolarisés (un taux mondial de non-scolarisation de 9%), dont 32,1 millions sont des filles (53%). Là où les taux de non-scolarisation sont les plus élevés, les écarts sexospécifiques tendent à être les plus larges. Par exemple, en Afrique subsaharienne 21 % des enfants ne sont pas scolarisés - dont 23% des filles contre 19% des garçons. Les filles sont aussi davantage susceptibles d’être complètement exclues de l’enseignement primaire: 15 millions de filles n’entreront probablement jamais dans une salle de classe comparé à 10 millions de garçons.  

D’un point de vue mondial, alors que le niveau d’éducation augmente, les filles ont tendance à s’en sortir légèrement mieux en termes de participation. Au niveau du premier cycle de l’enseignement secondaire, 60 millions d’adolescents ne sont pas scolarisés (un taux de non-scolarisation de 16%), les filles représentant 48,5% (29,1 millions) contre un peu moins de 52% pour les garçons (31,1 millions). Sur les 142 millions de jeunes non scolarisés (un taux de non-scolarisation de 37%) au deuxième cycle de l’enseignement secondaire, 69,1 millions sont des filles (48,7%) et 72,7 millions sont des garçons (51,2%).

Ces statistiques, masquent cependant des disparités au niveau régional et national. Par exemple, en Asie occidentale, 20% des filles adolescentes continuent d’être exclues du premier cycle de l’enseignement secondaire contre 13% des garçons. En Afrique subsaharienne, le taux de non-scolarisation féminin est de 36% contre 32% pour les hommes. Les jeunes femmes sont aussi plus susceptibles d’être exclues du deuxième cycle de l’enseignement secondaire dans le Caucase et en Asie centrale, en Afrique du nord, en Asie du sud, en Afrique subsaharienne, et en Asie occidentale.

Les chiffres mondiaux négligent également l'exclusion historique des filles et des femmes de l'éducation, reflétée dans les statistiques reflétant que les deux tiers des 758 millions d’adultes analphabètes dans le monde sont des femmes.

Malgré une augmentation des taux d’inscription des filles à l'école primaire, il existe une disparité dans les taux d'achèvement. En Afrique subsaharienne, il existe une parité entre les sexes parmi les 20% des personnes les plus riches ayant achevé le cycle d’éducation primaire mais parmi les 20 % les plus pauvres, 83 filles ont terminé leur éducation primaire contre 100% chez les garçons, ce qui chute à 73 pour le premier cycle de l’enseignement secondaire et 40 pour le deuxième cycle de l’enseignement secondaire (UNESCO, 2016). Au rythme actuel, les garçons les plus pauvres d'Afrique subsaharienne atteindront l'achèvement de l’enseignement primaire universel en 2069, mais cela prendra près de 20 ans de plus pour les filles les plus pauvres.

De nombreux pays qui affichent des taux de rétention plus élevés aux niveaux primaires ne parviennent pas à transférer ces gains vers la transition des filles au niveau secondaire. Par exemple, en Tanzanie, l’inscription presque universelle des filles au niveau primaire a été atteint avec un taux de rétention de 89,2%, mais le taux de transition des filles au niveau secondaire n’est que de 32,3% (PME, 2013).

Les inégalités et la discrimination associées au lieu, à la pauvreté et au genre se recoupent pour aggraver les disparités dans les taux d’achèvement et de transition. Par exemple, en 2013 au Nigéria, plus de 90 % d’adolescents issus de foyers riches, urbains ou ruraux, filles ou garçons, étaient susceptibles de finir le premier cycle du secondaire alors que seulement 3% des jeunes femmes pauvres des zones rurales terminaient le premier cycle du secondaire, contre 17% des jeunes hommes pauvres des zones rurales (UNESCO, 2016).

Cependant, les statistiques sur la participation, l’achèvement et la transition ne disent pas tout et ne saisissent pas les façons dont les filles sont discriminées au sein des systèmes éducatifs et les multiples obstacles que les filles doivent surmonter pour terminer leur éducation, particulièrement en ce qui concerne la qualité de l’éducation qu’elles reçoivent.

Le droit à l’éducation fondé sur la non-discrimination et l’égalité est un droit reconnu en vertu du droit en matière de droits humains. Les dispositions en lien avec l’égalité des sexes dans l’éducation peuvent être trouvées au sein de traités internationaux généraux et spécifiques, ainsi que dans les traités conclus dans la plupart des régions du monde.  

À ce stade, il peut être utile de se référer à notre page l’éducation: un droit, qui explique le contenu normatif du droit à l'éducation, qui correspond à ce qui est conféré aux détenteurs de droits (l'éducation doit être acceptable, accessible, adaptable, et à disposition) et les obligations légales des États de mettre en oeuvre ce contenu, y compris les obligations d'effet immédiat, les obligations fondamentales minimales et la réalisation progressive, essentielles à la compréhension du contenu exposé ci-dessous.

En résumé, toutes les dispositions relatives à la non-discrimination comportent des obligations immédiates et sont considérées comme une obligation fondamentale minimale, ce qui signifie que les États doivent prendre des mesures immédiates en priorité. Les dispositions relatives à la réalisation de l'égalité réelle, si elles ne visent pas à éliminer la discrimination, et à réaliser le droit à une éducation de qualité pour tous (à quelques exceptions près) sont sujettes à une réalisation progressive. Cela signifie que les États ont l'obligation de prendre des mesures délibérées, concrètes et ciblées, en fonction des ressources maximales disponibles, pour avancer rapidement et efficacement vers la pleine réalisation du droit à l'éducation.

La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979, CEDAW) est le seul traité juridiquement contraignant au niveau international qui se concentre exclusivement sur les droits des femmes. Il interprète et applique le droit à l’éducation d’une manière qui tient compte des besoins et des circonstances spécifiques des femmes et des filles. L’article 10 de la CEDAW est la disposition la plus complète sur le droit à l’éducation des femmes et des filles au sein du droit international. Il énonce le contenu normatif relatif à l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et à la garantie de l’égalité des droits avec les hommes dans le domaine de l’éducation, notamment :

  • les mêmes conditions d’accès aux études et aux diplômes à tous les niveaux d’éducation, à la fois dans les zones rurales et urbaines
  • une même qualité de l’éducation
  • l’élimination de tout concept stéréotypé du rôle des femmes et des hommes   (voir ci-dessous)
  • les mêmes possibilités de bénéficier de bourses d’études
  • le même accès aux programmes de formation continue, dont les programmes d’alphabétisation, particulièrement ceux visant à réduire l’écart entre les sexes dans l’éducation.
  • la réduction des taux d’abandon scolaire féminins et des programmes pour les filles et les femmes ayant quitté l’école de manière prématurée
  • la même possibilité de participer aux activités sportives et à l’éducation physique
  • l’accès à l’information éducative sur la santé, y compris des conseils sur la planification familiale

Plusieurs autres dispositions de la CEDAW sont également pertinentes à l’égalité entre les sexes dans l’éducation.  

L’article 1 définit la discrimination entre les femmes comme:

toute distinction, exclusion ou restriction fondée sur le sexe qui a pour effet ou pour but de compromettre ou de détruire la reconnaissance, la jouissance ou l'exercice par les femmes, quel que soit leur état matrimonial, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme, des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans les domaines politique, économique, social, culturel et civil ou dans tout autre domaine.

L’article 2 décrit les mesures juridiques et politiques que les États devraient entreprendre pour éliminer la discrimination entre les femmes et s’applique donc à l’ensemble des droits énoncés dans la CEDAW. Cela inclut des mesures juridiques et politiques en lien avec la mise en oeuvre du droit à l’éducation sur une base non-discriminatoire.

L’article 3 demande aux États de prendre toutes les mesures appropriées dans les domaines politiques, sociaux, économiques et culturels afin de garantir que les femmes puisse exercer et jouir de leurs droits humains sur un pied d’égalité avec les hommes.

L’article 4 décrit les conditions de recours à des mesures temporaires spéciales pour accélérer l’égalité de facto entre les hommes et les femmes.

L’article 5 demande aux États de prendre des mesures appropriées pour éliminer les stéréotypes sexistes (voir ci-dessous), les préjugés, les pratique culturelles discriminatoires, et toutes les autres pratiques qui sont basées sur l’idée d’infériorité ou la supériorité de l’un ou l’autre des deux sexes ou sur des rôles stéréotypés des femmes et des hommes.

L’article 7 concerne le droit à participer à la vie publique et politique. ces droits sont fondamentaux au moment de s’assurer que la perspective et les questions de genre sont prises en compte au moment de concevoir, de formuler et de mettre en oeuvre des lois, politiques et autres mesures affectant l’égalité entre les sexes dans l’éducation.

L'article 11, (1) (c), prévoit le droit à la formation professionnelle et à la reconversion, y compris l'apprentissage, la formation professionnelle avancée et la formation périodique.

L’article 14 (d) énonce le droit à l’éducation des femmes rurales, qui inclut le droit à obtenir toutes sortes de formation et d’éducation, formelles et non-formelles, dont celles concernant l’alphabétisation fonctionnelle.  

Pour finir, l'article 16 énonce les droits des femmes en matière de mariage et de vie familiale. L'article 16 (2) interdit explicitement le mariage d’enfants et impose aux États de fixer un âge minimum pour le mariage (voir ci-dessous).

Recommandation générale No 36 sur le droit à l’éducation des femmes et des filles

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a émis une interprétation autoritaire de l'article 10 dans l’Observation générale No 36 sur le droit des filles et des femmes à l’éducation, qui précise les obligations juridiques des États en vertu de la CEDAW d’éradiquer les obstacles discriminatoires empêchant les filles de jouir de leur droit à l'éducation et mettre en œuvre des mesures visant à instaurer l'égalité dans la pratique, et formuler des recommandations juridiques et politiques concrètes et réalisables qui permettraient aux États de se conformer à la CEDAW. Ce faisant, le Comité introduit une nouvelle approche pour comprendre la pleine nature du droit: le «cadre tridimensionnel des droits fondamentaux», qui comprend les droits d'accès à l'éducation, l’éducation en tant qu’espace de droits et l’éducation en tant que vecteur de droits droits.

Les droits à l'accès à l'éducation implique la participation et se reflète dans “le degré d’égalité de représentation entre, d’une part, les filles et les garçons et, d’autre part, entre les femmes et les hommes, et l’existence d’infrastructures adéquates, à tous les niveaux, pour accueillir les différentes cohortes d’âge.” (paragraphe 15). L'accessibilité comprend trois éléments: l'accessibilité physique qui nécessite la disponibilité d'infrastructures adéquates; l'accessibilité technologique pour les personnes qui ne peuvent pas aller à l'école, par exemple grâce aux technologies de l'information et de la communication dans des environnements d'apprentissage à distance et ouverts; et l'accessibilité économique, ce qui signifie que l'éducation doit être gratuite du niveau préscolaire au niveau secondaire et progressivement gratuite au niveau tertiaire.

L’éducation en tant qu’espace de droits correspond étroitement aux concepts “d’acceptabilité” et de “qualité” et va “au-delà de l’égalité numérique et vise à promouvoir une véritable égalité des sexes dans l’éducation. Ces droits concernent l’égalité de traitement et de chances, ainsi que la nature des relations entre les étudiants et enseignants masculins et féminins au sein des établissements d’enseignement. Cet aspect de l’égalité est particulièrement important, car la société façonne et reproduit les inégalités fondées sur le sexe par le truchement des institutions sociales, et les établissements d’enseignement jouent à cet égard un rôle crucial. Au lieu de s’attaquer aux normes et pratiques discriminatoires sexistes bien enracinées, l’école, dans de nombreuses sociétés, renforce les stéréotypes sexistes et maintient l’ordre sexospécifique en reproduisant les hiérarchies hommes-femmes et les liens de domination et subordination, ainsi que les dichotomies reproduction - production et privé-public” (paragraphe 16).

L’éducation en tant que vecteur de droits “s’intéresse à la manière dont l’école forge les droits et l’égalité des sexes dans les aspects de la vie qui se situent en dehors de la sphère de l’éducation. L’absence de tels droits est particulièrement criante lorsque l’éducation, qui devrait être porteuse de changement, ne permet pas d’obtenir des avancées significatives concernant la condition des femmes au plan social, culturel, politique et économique, ce qui les prive de la pleine jouissance des droits qui sont les leurs dans ces domaines. L’une des questions majeures est ici de savoir si les diplômes ont la même valeur et la même utilité sociale pour les femmes que pour les hommes. Lorsque l’on examine la situation à l’échelon mondial, il apparaît que, bien souvent, les hommes occupent de meilleurs postes que les femmes même lorsque leur niveau d’instruction est inférieur” (paragraphe 17).


La Convention de l’UNESCO contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement (1960, CADE pour son sigle en anglais) interdit toute forme de discrimination dans l’éducation, y compris celles fondées sur le genre. La CADE définit la discrimination dans l’article 1, qui est plus spécifique que la définition de la CEDAW dans la mesure où elle s’applique uniquement à l’éducation. Par exemple, elle fait référence à la discrimination à la fois dans l’accès et dans la qualité de l’éducation et aux écoles séparant les filles et les garçons.

l’article 2 (a) de la CADE permet “la création ou le maintien de systèmes ou d'établissements d'enseignement séparé pour les élèves des deux sexes, lorsque ces systèmes ou établissements présentent des facilités d'accès à l'enseignement équivalentes, disposent d'un personnel enseignant possédant des qualifications de même ordre et permettent de suivre les mêmes programmes d'études ou des programmes d'études équivalents”. L’article 2 (c) permet la création ou le maintien d’établissements d’enseignement privés tant que “ces établissements ont pour objet non d'assurer l'exclusion d'un groupe quelconque”.

Plusieurs autres traités internationaux relatifs aux droits humains garantissent également le droit à l’éducation des femmes et des filles en combinant des dispositions générales sur la non-discrimination avec des dispositions spécifiques relatives au droit à l’éducation.

Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966, PIDESC) garantit le droit à l’éducation de tous sur la base de l’égalité et de la non-discrimination (Articles 13 et 14) et interdit expressément toute discrimination fondée sur le sexe (Articles 2 (2) et 3). Dans son observation générale sur le droit à l’éducation, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels impose des obligations en vertu des articles 2 (2) et 3 se rapportant au droit à l’éducation, clarifiant, entre autres, que les mesures temporaires pour instaurer l’égalité de facto entre les sexes en ce qui concerne l’éducation sont légitimes tant que cette action positive n’amène pas au ‘maintien de normes inégales ou séparées pour différents groupes, et à condition qu’elles ne soient pas maintenues une fois que les objectifs pour lesquels elles ont été instaurées ont été atteints”. Le Comité stipule également que les États “doivent surveiller l’éducation de près - notamment toutes les politiques, institutions, programmes, schéma de dépenses et autres pratiques - afin d’identifier et de prendre des mesures pour corriger toute discrimination de facto. Les données relatives à l’éducation devraient être ventilées selon les motifs illicites de discrimination.”

L’article 2 (2) de la Convention relative aux droits de l’enfant (1989, CIDE) interdit la discrimination fondée sur le sexe. Lorsqu’ils sont lus avec les articles 28 et 29 sur le droit à l’éducation et les objectifs de l’éducation, respectivement, il existe une obligation juridique claire de garantir une égalité et une non-discrimination dans l’éducation. En outre, les objectifs de l’éducation, prévus à l’article 29 (1), incluent de: “Préparer l'enfant à assumer les responsabilités de la vie dans une société libre, dans un esprit de compréhension, de paix, de tolérance, d'égalité entre les sexes et d'amitié entre tous les peuples”.

L’article 6 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (2006, CRDH) reconnaît que les filles handicapées peuvent être l’objet de multiples discriminations et oblige les États à “ prendre toutes les mesures appropriées pour assurer le plein développement, promotion et émancipation des femmes” en matière de droits relatifs à la CRDH, ce qui comprend le droit à l’éducation, garantis en vertu de l’article 24. Le Comité des droits des personnes handicapées, dans son interprétation de l’article 24 de l’observation générale 4 stipule que les États doivent identifier et éliminer tout obstacle et mettre en place des mesures spécifiques pour garantir que le droit à l’éducation des femmes et des filles handicapées ne soit pas entravé par une discrimination, une stigmatisation, ou un préjugé fondé sur le sexe et/ou sur le handicap. L’article 8 (1) (b) reconnaît que les stéréotypes liés au sexe peuvent recouper les stéréotypes sur les personnes handicapées, et demande aux États de “prendre des mesures immédiates, efficaces et appropriées en vue de combattre les stéréotypes, les préjugés et les pratiques dangereuses concernant les personnes handicapées, y compris ceux liés au sexe et à l’âge, dans tous les domaines”.

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1996, PIDCP) dispose d'une clause de non-discrimination autonome (Article 26) qui s'applique à “tout domaine réglementé et protégé par les autorités publiques”. Le Comité des droits de l’homme a expliqué que : “ lorsqu’une législation est adoptée par un État partie, elle doit se conformer aux exigences de l’article 26 stipulant que son contenu ne devrait pas être discriminatoire. En d’autres termes, la mise en oeuvre du principe de non-discrimination énoncé à l’article 26 n’est pas limitée aux droits énoncés dans le Pacte.” Selon cette interprétation, en vertu du PIDCP, il existe une obligation de garantir que les lois et les réglementations relatives à l’éducation ne discriminent pas les femmes et les filles.

Les femmes et les filles sont confrontées à différents obstacles en ce qui concerne leur éducation, et ce dans différentes régions du monde. Le droit à l’éducation, bien qu’universel, prend des significations différentes lorsqu’il est interprété et appliqué compte tenu des coutumes, des traditions, des cultures, des valeurs régionales, etc. Les traités régionaux relatifs aux droits humains, garantissent par conséquent le droit à l’éducation d’une forme sous la forme adaptée de celle qui reconnaît les obstacles communs à la région, et tient compte des objectifs éducatifs universels et spécifiques à chaque région.

L’Afrique est la seule région qui a un traité relatif aux droits humains consacré spécifiquement aux femmes et aux filles. L’article 12 de ce Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (2003) charge les États partie d’éliminer toute discrimination à l’égard des femmes dans l’éducation, et les oblige notamment à :

  • éliminer tous les stéréotypes liés au sexe dans les manuels scolaires, les programmes d’enseignement et les médias ;
  • protéger la femme, en particulier la petite fille contre toutes les formes d’abus, y compris le harcèlement sexuel dans les écoles et autres établissements et prévoir des sanctions contre les auteurs de ces pratiques;
  • faire bénéficier les femmes victimes d’abus et de harcèlements sexuels de conseils et de services de réhabilitation
  • intégrer la dimension de genre et l’éducation aux droits humains à tous les niveaux

En vertu du Protocole, les États doivent promouvoir activement:

  • l’alphabétisation des femmes
  • l’éducation et la formation des femmes à tous les niveaux et dans toutes les disciplines et en particulier dans les domaines de la science et de la technologie
  • l’inscription et le maintien des filles dans des structures éducatives formelles et non-formelles, y compris les programmes d’éducation de base.

Le Protocole engage également les États parties à prendre des mesures sur un certain nombre de questions affectant le droit des femmes et des filles à l’éducation, notamment :

  • éliminer la discrimination à l’égard des femmes (Article 2)
  • interdire les mutilations génitales féminines (Article 5 (b))
  • fixer l’âge minimum du mariage pour les filles à 18 ans (Article 6 (b))
  • assurer la participation effective et la représentation des femmes dans les processus de prise de décision (Article 9 (2))
  • garantir les droits à la santé et au contrôle des fonctions de reproduction (Article 14)

​Le droit à l’éducation des filles est aussi largement protégé par plusieurs autres traités africains.

L’article 13 de la Charte africaine de la jeunesse (2006, CAJ) définit le droit à l’éducation appliqué à la jeunesse africaine (toute personne de 15 à 35 ans, tel que le définit la CAJ), notamment les dispositions exigeant :

  • que les programmes d’enseignement incluent des informations sur les pratiques culturelles qui sont nocives à la santé des jeunes femmes et des filles (Article 13 (3) (f))
  • que les filles et les jeunes femmes tombant enceintes ou se mariant aient l’opportunité de poursuivre leur formation (Article 13 (4) (h))
  • l’introduction de programmes d’octroi de bourses d’études pour encourager l’inscription à l’enseignement post-primaire et supérieur pour les jeunes remarquablement doués issus de communautés défavorisées, et spécialement les jeunes filles (Article 13 (4) (l))
  • d’instituer et promouvoir la participation de toutes les jeunes femmes et tous les jeunes hommes aux activités sportives, culturelles et de loisirs comme faisant partie du développement intégral (Article 13 (4) (m))
  • de promouvoir une éducation culturellement appropriée, tenant compte d’une sexualité conforme à l’âge ainsi qu’une responsabilité parentale (Article 13 (4) (n))

L’article 11 de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (1990) exige que les États parties prennent des mesures spéciales pour assurer l’accès égal des filles à l’éducation (Article 11 (3) (e)) et prennent “toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que les filles qui deviennent enceintes avant d'avoir achevé leur éducation aient la possibilité de la poursuivre compte tenu de leurs aptitudes individuelles.” (Article 11 (6)).exige que les États parties prennent des mesures spéciales pour assurer l'égalité d'accès à l'éducation des filles (article 11.3) e)) et prennent toutes les mesures appropriées pour garantir que “les filles qui deviennent enceintes avant d'avoir achevé leur éducation aient la possibilité de la poursuivre compte tenu de leurs aptitudes individuelles” (article 11 (6)).

Pour plus d’informations, veuillez consulter le rapport conjoint de la Commission de l’Union africaine et du HCDH, Women’s Rights in Africa (2016).

Dans le monde Arabe, la Charte arabe des droits de l’homme (2004) garantit l’égalité entre les hommes et les femmes et la non-discrimination dans l’article 3 et le droit à un enseignement primaire “obligatoire et accessible” sans discrimination dans l’article 41.

En Asie, la Déclaration des droits de l’homme de l’ASEAN (2012, lien en anglais) qui n’est pas juridiquement contraignante, garantit le droit à l’éducation dans l’article 31 et la non-discrimination en tant que principe général, mais non en tant que droit humain. 

En Europe, la Convention européenne des droits de l’homme (1950) garantit le droit à la non-discrimination dans l’article 14 qui, lu avec l’article 2 du Protocole à la Convention européenne des droits de l’homme (1958) sur le droit à l’éducation, interdit la discrimination dans l’éducation fondée sur le sexe. De plus, le protocole 12 à  la Convention européenne des droits de l’homme (2000) interdit la discrimination dans l’exercice de tout droit reconnu par la législation nationale.

La Charte sociale européenne (révisée) (1996) interdit la discrimination en vertu de l’article E, à condition que l’État prenne toutes les mesures nécessaire pour assurer un enseignement primaire et secondaire gratuit, ainsi qu'à favoriser la régularité de la fréquentation scolaire en vertu de l’article 17, et le droit à l’orientation professionnelle (Article 9) et à la formation (Article 10).

La Convention sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (2011, Convention d’Istanbul) identifie l’éducation comme domaine fondamental dans lequel prendre des mesures pour éliminer la violence sexiste et ses causes, et oblige les États à prendre :

les actions nécessaires pour inclure dans les programmes d’étude officiels et à tous les niveaux d’enseignement du matériel d’enseignement sur des sujets tels que l’égalité entre les femmes et les hommes, les rôles non stéréotypés des genres, le respect mutuel, la résolution non violente des conflits dans les relations interpersonnelles, la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, et le droit à l’intégrité personnelle, adapté au stade de développement des apprenants.

La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (2010), qui s’applique aux institutions et organes de l’UE ainsi qu’aux États membres de l’UE lorsqu’ils agissent dans le cadre législatif européen, garantit le droit à l’éducation (Article 14), la non-discrimination (Article 21), et l’égalité entre les hommes et les femmes (Article 23).

En outre, le Conseil de l’Europe a adopté une Recommandation juridiquement non contraignante du Comité des ministres aux États membres relative à l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’éducation (2007).

Dans la région interaméricaine le Protocole additionnel à la Convention américaine relative aux droits de l’homme traitant des droits économiques, sociaux et culturels, “Protocole de San Salvador” (1988) interdit la discrimination en vertu de l’article 3 et le droit à l’éducation en vertu des articles 13 et 16.

Les articles 34, 49, et 50 de la Charte de l’organisation des États américains (1948) garantissent plusieurs aspects du droit à l’éducation.

La Convention interaméricaine pour la prévention, la sanction et l’éradication de la violence à l’égard des femmes (1994, Convention de Belém do Pará) stipule que toutes les  femmes ont le droit de ne pas être soumises à la violence, ce qui comprend le droit d’être libre de toutes formes de discrimination et le droit de «recevoir une éducation dénuée de stéréotypes en matière de comportement et de pratiques sociales et culturelles fondées sur des concepts d'infériorité ou de subordination» (article 6).

Enfin, la Charte démocratique interaméricaine (2001) appelle à l'élimination de la discrimination fondée sur le sexe (article 9) et stipule qu '«une éducation de qualité doit être accessible à tous, notamment aux jeunes filles et aux femmes». (Article 16).

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Lorsqu’un État ratifie un traité de défense des droits humains garantissant le droit à l’éducation, sans discrimination d’aucune sorte (voir les trois sections ci-dessus), il est également tenu de mettre en oeuvre ces dispositions dans sa juridiction. Cela signifie que les États ne peuvent pas simplement ratifier un traité garantissant les droits humains sans prendre les mesures nécessaires pour en faire une réalité pour ses citoyens. De telles mesures incluent des mesures administratives, juridiques, politiques et économiques. L’Observation générale No 36 sur le droit des filles et des femmes à l’éducation du Comité sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes élabore de telles mesures et expose des recommandations juridiques et politiques précises et applicables qui permettraient aux États de respecter les obligations découlant de l’article 10 et d’autres dispositions pertinentes de la Convention de l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes (CEDAW).

L’engagement juridique des États envers la CEDAW, la Convention de l’Unesco concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement (CADE pour son sigle en anglais), le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et politiques (PIDESC), la Convention relative aux droits de l’enfant (CDE)— à savoir les 4 principaux traités garantissant le droit à l’éducation des femmes et des filles - est relativement généralisé. En décembre 2017, 189 États avaient ratifié et adhéré à la CEDAW, soit 96% des États membres de l’ONU. La CADE compte 101 États parties, le PIDESC compte 166 États parties, et la CDE compte 196 États parties. Selon nos recherches (à paraître), qui classent les États selon leur niveau d'engagement juridique envers l'égalité des sexes dans l'éducation sur la base des traités qu'ils ont ratifiés, près de la moitié des États (87,44%) ont l'engagement juridique le plus élevé. Les États se regroupent autour des deux niveaux les plus élevés (sur six niveaux) (144; 73%). Cependant, malgré cela, la mise en œuvre universelle du droit à l'éducation à l’échelle nationale pour toutes les femmes et les filles est loin d'être atteinte, ce qui constitue un obstacle structurel majeur à la réalisation de l'égalité des sexes dans l'éducation. Voici ci-dessous une carte montrant quels États protègent constitutionnellement le droit à l'éducation des femmes et des filles.

Pour plus d’informations sur le statut juridique du droit à l’éducation des filles et des femmes dans des pays spécifiques, veuillez consulter :

  • Le document de référence du RTE pour l’examen sexospécifique du Rapport mondial de suivi sur l’éducation de 2017 qui inclut des informations sur l’engagement juridique de chaque État à la réussite du droit à l’éducation des femmes et des filles, sans discrimination
  • La base de données mondiale de l’Unesco sur le droit à l’éducation (recherche par thèmes "non-discrimination" et "égalité des genres")

De plus, UNGEI a produit des directives utiles à l'intention des planificateurs de l'éducation aux niveaux national et régional pour les aider à élaborer des plans pour le secteur éducatif qui soient attentifs aux sexospécificités.

Les femmes et les filles sont titulaires de droits et, en tant que telles, ont droit au plein exercice et à la jouissance égale du droit à l'éducation. Cependant, en plus d'être un droit fondamental en soi, le droit à l'éducation est un «droit multiplicateur» et est, par conséquent, essentiel pour leur permettre de bénéficier et de revendiquer d’autres droits fondamentaux, tels que ceux liés au travail, à la propriété, à la participation politique, à l'accès à la justice, à l'élimination de la violence et à l’accès à la santé, y compris la santé et les droits sexuels et reproductifs.

Les filles qui reçoivent plus d’éducation sont moins susceptibles de se marier enfant et de tomber enceinte et de devenir de jeunes mères. Selon Plan International, une fille issue d’un pays à faible revenu qui reçoit sept ans d’éducation se marie quatre ans plus tard en moyenne, et a moins d’enfants et en meilleure santé. Selon l’UNESCO, les enfants de mères alphabétisées ont plus de 50% de chances en plus de vivre au delà de l’âge de cinq ans. Il y a également des avantages significatifs pour la santé des filles et des femmes, avec des preuves considérables qu'une augmentation de l'éducation de la mère réduit la probabilité de mourir en couches.

Assurer une éducation de qualité pour toutes les filles augmente aussi le montant de leurs revenus et prévient la féminisation continue de la pauvreté. Selon le Groupe de la Banque mondiale (GBM), une année d'études secondaires pour une fille peut représenter jusqu'à  25% d’augmentation de salaires plus tard dans la vie. Les bénéfices en sont transmis à leurs enfants dans la mesure où les femmes ont tendance à réinvestir 90% de leur revenu dans leur famille. 

Les études ont montré de façon constante qu’éduquer les filles apporte des bénéfices importants et de grande ampleur non seulement aux femmes elles-mêmes et à leurs familles, mais aussi à leurs sociétés et économies. Il s’est avéré que l’éducation des filles a un impact important sur la croissance économique. Selon GBM, une hausse d’un point de pourcentage dans la proportion des femmes ayant fait des études secondaires augmente le produit intérieur brut (PIB) de 0.3 %. L’éducation peut améliorer les opportunités de travail des femmes, ce qui peut avoir un impact sur la réduction de la pauvreté. Par exemple, en Amérique latine, lorsque la participation des femmes au marché du travail a augmenté de 15 % en une seule décennie, le taux de pauvreté a baissé de 30 % (GBM).

Les filles et les femmes sont confrontées à des formes spécifiques de discrimination dans l'accès à l'éducation, au sein des systèmes éducatifs et à travers l'éducation. Les accordéons ci-dessous expliquent les obstacles les plus courants rencontrés par les femmes et les filles dans le monde. Chacun de ces obstacles est étayé par des stéréotypes sexistes néfastes sur le rôle des femmes et des hommes dans la société.

Bien que le sexe soit un motif de discrimination formellement interdit en vertu du droit international relatif aux droits humains, il est important de reconnaître que les femmes et les filles sont très hétérogènes. L'inégalité entre les sexes et la discrimination envers, au sein de et à travers l'éducation sont vécues sous des formes variées et à tous les niveaux par les femmes et les filles, selon leur contexte personnel, local et national. Mais chaque femme et fille qui a fréquenté l'école a probablement rencontré une forme de discrimination dans l'éducation à un moment de sa vie.

La discrimination croisée reconnaît que les femmes et les filles sont confrontées à la discrimination de différentes manières. L'interaction entre le genre et d'autres facteurs tels que la pauvreté, la vie en milieu rural et / ou des caractéristiques telles que la déficience physique ou mentale, la race, l'origine ethnique, l'orientation sexuelle et l’identité de genre (lien en anglais) exacerbe la discrimination dont les femmes et les filles sont victimes en ce qui concerne leur droit à l'éducation.

Par exemple, selon l’examen sexospécifique du Rapport mondial de suivi sur l’éducation de 2016 (p. 19), en 2011 en Inde, les taux d’achèvement du deuxième cycle du secondaire des filles et des garçons urbains riches était en moyenne de 70%. Pour les hommes ruraux pauvres, la moyenne était de 26% mais ce taux était beaucoup plus bas pour les femmes des zones rurales pauvres, ce qui indique que ce n’est pas leur sexe ou leur richesse ou le lieu où elles vivent qui affecte leur exercice du droit à l’éducation, mais l’intersection entre le fait d’être une femme, de s’identifier comme fille ou femme, de venir d’une famille à faibles revenus et de vivre dans une zone rurale.

Les filles et les femmes peuvent être confrontées à la discrimination dans tous les domaines et à toutes les étapes de leur vie. L'élimination de la discrimination dans l'éducation est un début important, mais les femmes et les filles continueront souvent à faire l'objet de discrimination à la sortie de l'école. La discrimination, sous toutes ses formes, qu'elle soit publique ou privée, doit être abordée de manière globale et intégrée (au niveau intersectoriel et à travers diverses mesures qui tiennent compte de la manière dont la discrimination et l'inégalité se cumulent tout au long de la vie d'une femme) et à tous les niveaux afin de garantir que les femmes et les filles jouissent et bénéficient de leur éducation. Les défis communs incluent :

  • l’écart de rémunération entre les sexes - les femmes, en moyenne, gagnent moins que les hommes (59% selon le Forum économique mondial (lien en anglais))
  • une participation et représentation politique inégale (selon l’Union interparlementaire seulement 23% des parlementaires et 5.7% des dirigeants mondiaux sont des femmes)
  • la sous-représentation dans certains domaines, tels que les sciences, la technologie, l'ingénierie, les mathématiques (STEM pour son sigle en anglais), ainsi que le sport, en particulier en ce qui concerne des postes de leadership.
  • absence de modalités de travail flexibles, congé parental, et allocations de maternité
  • insuffisance d’accès aux soins de santé et lacunes dans la jouissance de la santé et des droits sexuels et reproductifs
  • exposition à la violence sexiste contre les femmes, dont les pratiques néfastes
  • travail de soin rémunéré et non rémunéré qui continue d’être enduré de manière disproportionnée par les femmes et les filles (Rapport d’ActionAid qu’une femmes travaillera en moyenne quatre années de plus que ses pairs masculins au cours de sa vie)

Les stéréotypes sexuels et les stéréotypes liés au genre renforcent ou exacerbent plusieurs des obstacles auxquels sont confrontés les femmes et les filles dans l’exercice de leur droit à l’éducation. Idéalement, les systèmes éducatifs devraient être des points centraux d’action pour combattre les stéréotypes sexuels et les stéréotypes liés au genre. Cependant, dans certains cas, le système éducatif, et particulièrement le programme éducatif, les manuels scolaires (lien en anglais), et les enseignants, contribuent à perpétuer des stéréotypes sexistes néfastes -des options de cours ou matières qu’elles suivent, qui influencent leurs perspectives d’emploi, à leur capacité à prendre des décisions éclairées concernant leur santé sexuelle et reproductive - qui ont de vastes conséquences sur les filles tout au long de leur vie.

Selon Cook et Cusack (2010, p. 9, lien en anglais) un stéréotype sexuel est une vision générale ou une idée préconçue sur les attributs et les caractéristiques qui sont ou devraient être possédés par, ou les rôles qui sont ou devraient être remplis par les femmes et les hommes. Selon un rapport du HCDH (2013, p. 18), un stéréotype sexuel est néfaste lorsqu’il limite la capacité des hommes et des femmes à développer leurs capacités personnelles, à poursuivre leur carrière professionnelle et à faire des choix concernant leur vie et leur projet de vie.

Le stéréotype lié au genre est la pratique selon laquelle on attribue à un homme ou une femme des attributs spécifiques, des caractéristiques, ou des rôles du seul fait de son appartenance au groupe social des femmes ou des hommes. Les stéréotypes liés au genre sont considérés comme abusifs lorsqu’ils aboutissent à une ou des violations des droits humains et des libertés fondamentales. 

Les stéréotypes sexuels néfastes et les stéréotypes abusifs liés au genre peuvent affecter les filles avant qu’elle n’entrent dans une salle de classe et peuvent même les empêcher d’aller à l’école. Par exemple, les points de vue stéréotypés voulant que les filles soient domestiques, ménagères et prestataires de soins peuvent amener les familles à remettre en question l’utilité d’envoyer leurs filles à l’école si elles sont censées devenir femmes et mères, alors que le stéréotype voulant que les hommes soient la source de revenu signifie que les garçons ont la priorité en ce qui concerne l’éducation. Même lorsque les filles vont à l’école, certaines doivent encore jongler avec les responsabilités domestiques comme le nettoyage, la cuisine et la corvée d’eau, en plus de leur travail scolaire.

Les stéréotypes sexuels néfastes et les stéréotypes abusifs liés au genre affectent également les filles dans l’environnement scolaire. Par exemple, les stéréotypes sur les différentes capacités cognitives et physiques des filles et des garçons, conduisent à ce que certaines matières scolaires et méthodes d’enseignement soient sexuées. On considère que les garçons sont mieux adaptés aux mathématiques, à la technologie, aux sciences et au sport, tandis que les filles sont considérées comme plus adaptées aux arts et aux sciences humaines. Ceci a pour effet d’exclure les filles et les garçons de certaines matières (parfois, particulièrement dans les écoles pratiquant la ségrégation entre les sexes, certaines matières ne sont même pas proposées aux étudiantes) mais ça a également un effet néfaste sur les futures opportunités éducatives et professionnelles des filles, dans la mesure où les filles et les garçons étudient des matières différentes à l’université, où les matières “masculines” tendent à aboutir à des carrières plus lucratives et influentes. L’inégalité entre les sexes est ensuite perpétuée par le biais de pratiques d’embauches qui défavorisent davantage les femmes. (lien en anglais)

Le droit international relatif aux droits humains impose des obligations spécifiques aux États pour éliminer les stéréotypes sexuels néfastes et les stéréotypes abusifs liés au genre. Veuillez consulter notre fiche d’information juridique sur les stéréotypes sexuels et le droit à l’éducation pour plus d’informations.

Le mariage d’enfants correspond à toute union formelle et informelle où l’une ou les deux parties ont moins de 18 ans. Selon Filles, pas épouses, tous les ans 15 millions de filles mineures se marient. Dans le monde, on estime qu’il y a 720 millions de femmes qui ont été mariées avant l’âge de 18 ans —cela correspond à 10% de la population mondiale. Le mariage d’enfants se produit partout mais il est le plus répandu en Asie du Sud (45% des filles mariées avant 18 ans; 17% mariées avant 15 ans), Afrique sub-saharienne (39%; 12%), et Amérique latine et Caraïbes (23%; 5%).

Terminologie

Le “mariage d’enfants”, “mariage précoce”, “mariage arrangé”, et “mariage forcé” sont des termes souvent utilisés de manière interchangeable. Cependant, chacun décrit un phénomène particulier, qui en pratique, se chevauchent souvent. Le mariage forcé est le cas où une ou les deux personnes ne consentent pas au mariage ou ne consentent pas à rester mariés, et la pression ou les mauvais traitements sont utilisés pour contraindre une ou les deux parties. Cela est différent d’un mariage arrangé, où les deux personnes ont au moins 18 ans et ont consenti à l’union. Les mariages d’enfants sont une forme de mariage forcé parce que l’enfant ne peut pas fournir un consentement total, libre et éclairé. Le mariage précoce est souvent utilisé comme synonyme de mariage d’enfants. À RTE, nous préférons utiliser le terme “mariage d’enfants” parce que “précoce” est un terme relatif, alors que le terme “enfant” fait référence, en vertu du droit international, à toute personne n’ayant pas atteint l’âge de la majorité, par exemple, l’âge auquel une personne est considérée comme adulte. Pour plus d’informations, voir les paragraphes 20-24 de la Recommandation générale commune No 31 de la CEDAW et du CDE sur les pratiques néfastes.  

 


 

Le mariage d’enfants est une pratique discriminatoire ancrée dans la notion que les femmes et les filles sont inférieures aux hommes et devraient se conformer aux stéréotypes sexuels qui valorisent les femmes comme mères, prestataires de soins, propriété des hommes, objets sexuels, vulnérables et ayant besoin de protection, et non comme détentrices de droits. Une myriade de facteurs contribue également à perpétuer le mariage d’enfants, notamment: les inégalités liées au genre, la pauvreté, les lacunes et l’absence de mise en œuvre des lois, le manque d’éducation, la pression des pairs et les conflits et les situations d’urgence. Voir la page de CARE sur les causes du mariage d’enfants (en anglais) pour plus d’informations.

Le mariage d’enfants viole de multiples droits humains, notamment le droit à l’éducation, ce qui en fait une pratique particulièrement volontairement nuisible. Les enfants qui se marient ont plus de chances d’abandonner l’école et les enfants qui ne sont pas scolarisés sont plus susceptibles de se marier. Les statistiques de la Banque mondiale et du centre international de recherche sur les femmes (lien en anglais) révèlent que 10 à 30% des parents, selon les pays, ont déclaré que leur enfant avait abandonné l’école secondaire en raison de mariage d’enfants et / ou de grossesse. Leur recherche indique également que pour chaque année où une fille se marie avant 18 ans, sa probabilité de terminer les études secondaires diminue de 0,22 années en moyenne. En Amérique latine et en Asie, les filles qui se marient avant l’âge de 12 ans ont une probabilité réduite de 21% de terminer leurs études secondaires.

Bien que le droit international le permette, les mariages qui ont lieu après l’âge de 18 ans peuvent aussi avoir un impact sur l’éducation des filles, particulièrement leur capacité à accéder à l’enseignement supérieur ou d’autres formes d’enseignement tertiaire.

La grossesse précoce et non désirée est liée au mariage d’enfants. Le rapport de Filles, pas épouses indique que 90% des naissances chez les adolescents dans les pays à faible revenu et à revenu intermédiaire concernent les filles mariées. La grossesse et la maternité ont souvent de profonds impacts sur l’éducation des filles. Il est souvent interdit aux filles enceintes de se rendre à l’école et aux examens, et les mères n’ont souvent pas accès aux programmes de transition qui permettent aux filles de rattraper leur retard dans l’éducation afin de réintégrer l’enseignement ordinaire. En outre, le manque de services de garde gratuits pour la petite enfance et les croyances largement répandues que l’éducation des enfants est la responsabilité première de la mère, signifie que les femmes et les filles ne réintègrent souvent pas l’enseignement.

La grossesse et la maternité peuvent également survenir indépendamment du mariage d’enfants, en raison du viol, ce qui est particulièrement fréquent pendant les conflits et autres situations d’urgence (voir le cas de la Sierra Leone (lien en anglais) qui a assisté à une augmentation des grossesses chez les adolescentes pendant la crise Ebola en raison de la fermeture des écoles). La grossesse et la maternité chez les adolescentes est également la conséquence du manque d’informations relatives à la santé sexuelle et reproductive et d’un manque d’accès à la contraception (contrôle des naissances).

Que dit alors le droit international sur le mariage d’enfants et quelles obligations les États ont-ils à garantir le droit à l’éducation des filles mariées et / ou enceintes?

Le Comité des droits de l’enfant et le Comité pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ont déclaré, dans une Recommandation commune, que l’âge minimum de mariage devrait être de 18 ans à la fois pour les hommes et les femmes. Cependant, les Comités considèrent qu’il faut trouver un équilibre entre le fait de reconnaître que le mariage d’enfants est une pratique néfaste et discriminatoire et le fait de respecter que dans des cas exceptionnels, certains enfants peuvent être suffisamment mûres et capables de prendre des décisions éclairées les concernant en lien avec le mariage, à condition que l’enfant en question ait au moins 16 ans et que de telles décisions soient évaluées par un juge “pour des motifs légitimes exceptionnels définis par la loi et sur la base de preuves de la maturité de l’intéressé et non par soumission aux cultures et traditions”. (paragraphe 20).

Cependant, cette exception limitée n’affaiblit d’aucune manière les obligations des États d’éliminer le mariage d’enfants et les grossesses précoces ou involontaires, et de protéger les droits des enfants mariés et mères, y compris le droit à l’éducation.

Afin d'éviter les mariages d'enfants, les États doivent établir et faire respecter un âge minimum de 18 ans. Souvent, l'âge légal minimum du mariage est fixé, mais la loi est incohérente (voir le cas de la Tanzanie, par exemple). Le droit coutumier -comme la charia ou la loi tribale- est appliqué, ou encore la loi permet aux filles de se marier dans certaines situations, par exemple, si elles sont enceintes ou ont une autorisation parentale. En vertu du droit international, des exceptions comme celles-ci sont interdites.

En Afrique, la législation régionale relative aux droits humains est forte et exige que les États adoptent une législation fixant l'âge minimum du mariage à 18 ans sans exception (Article 6 (b), Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique  [2003]; Article 21 (2), Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant [1990].

Pour plus d’informations sur l’interprétation de ces articles, veuillez consulter l’Observation générale conjointe de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) et du Comité africain d’experts sur les droits et le bien-être de l’enfant (CAEDBE) sur l’éradication du mariage des enfants.

La carte ci-dessous montre que très peu d'États ont fixé l'âge minimum du mariage à 18 ans. Cela est particulièrement vrai pour les Amériques, l'Afrique subsaharienne et l'Asie du Sud-Est, qui sont toutes des régions où le taux de prévalence du mariage d’enfants est élevé. Il convient également de souligner que le mariage d’enfants est autorisé par la loi dans un certain nombre de pays du Nord, notamment les États-Unis (lien en anglais).

En vertu du droit international, les États ne sont pas autorisés à refuser l'accès à l'école en expulsant les filles pour cause de mariage, de grossesse ou d'accouchement, car cela constituerait une discrimination. Cela comprend une interdiction des tests de grossesse obligatoires, documentés dans divers États africains, notamment: la Tanzanie, le Ghana, le Kenya, le Nigéria, la Sierra Leone, l'Ouganda et le Zimbabwe.

En outre, pour remédier aux impacts négatifs qu’ont le mariage d’enfants et les grossesses précoces sur le droit à l'éducation, par exemple, si une fille rate son éducation primaire, les États doivent fournir une éducation de base, pour remplacer l'éducation primaire ratée pour les filles qui se sont mariées ou qui sont tombées enceintes à l’âge de l’enseignement primaire (article 13 (d) du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels). Cependant, la plupart des mariages d'enfants et des grossesses précoces surviennent au cours de l'enseignement secondaire. La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979, CEDAW) adapte la disposition relative à l'éducation de base pour y inclure des obligations de s’efforcer de garder les filles à l'école et d'organiser des “des programmes pour les filles et les femmes qui ont quitté l’école prématurément” (article 10 (f)). Les programmes qui permettent aux filles de réintégrer l'éducation sont connus sous le nom de «programmes de rattrapage». Des exemples performants de programmes de rattrapage comprennent la Zambie et l'Ouganda.

Compte tenu de la prévalence du mariage et de la grossesse d'enfants dans les pays africains, les lois africaines relatives aux droits humains prévoient également des programmes d'éducation de base et de réinsertion, mais les protections ne sont pas uniformes.

La Charte africaine de la jeunesse (2006) oblige les Etats à : "Veiller, lorsque nécessaire, à ce que les filles et les jeunes femmes qui tombent enceintes ou se marient avant l’achèvement de leurs études puissent avoir l’opportunité de continuer leur formation” (Article 13 (4) (h)) .

L’article 12 (2) (c) du Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique est moins spécifique et exhorte les États à “promouvoir l’inscription et le maintien des filles à l’école et dans d’autres centres de formation et d’organisation de programmes en faveur des filles qui quittent l’école prématurément”.

L’article 11 (6), de la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant demande aux États de prendre “ toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que les filles qui deviennent enceintes avant d'avoir achevé leur éducation aient la possibilité de la poursuivre compte tenu de leurs aptitudes individuelles.” Bien que cette disposition semble prévoir des programmes de rattrapage, la mise en garde que de telles opportunités sont basées sur la “capacité individuelle” est en deçà des normes internationales.  

Le droit international cherche également à habiliter les filles à prendre des décisions les concernant relatives aux grossesses non désirées et exige qu’une éducation sexuelle, en matière de santé reproductive et en matière de procréation responsable soient donnés aux garçons et aux filles. Voir, par exemple, l'article 10 (h), de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et l'article 13 (4) (n) de la Charte africaine de la jeunesse. Voici une vidéo expliquant l'importance de l'éducation sexuelle complète.

Enfin, le droit international exhorte les États à démanteler les conditions sociales, économiques, culturelles et politiques qui facilitent le caractère général de cette pratique. Une approche globale est nécessaire pour éliminer le mariage et la grossesse des enfants parce que ses causes sont variées et profondément enracinées. Cependant, les preuves suggèrent que toute approche doit inclure des efforts pour garantir que les filles jouissent et puissent exercer leur droit à l'éducation. Filles, pas épouses affirme que les filles ayant un niveau d'éducation secondaire ont six fois moins de chances de se marier qu'une fille peu ou pas scolarisée.

Pour plus d’informations sur la prévention de la grossesse précoce et non désirée et du mariage d’enfants par le biais de l’éducation, veuillez consulter le document de l’Unesco Grossesses précoces et non désirées : Recommandations à l’usage du secteur de l’éducation (2017).

Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (le Comité) définit la violence sexiste contre les femmes comme “la violence exercée contre une femme parce qu'elle est une femme ou qui touche spécialement la femme” (Recommandation générale 19, par. 6). Ces actes de violence revêtent plusieurs formes, notamment: « les actes ou omissions qui entendent ou peuvent provoquer ou entraîner un préjudice ou une souffrance de nature physique, sexuelle, psychologique ou économique aux femmes, voire leur mort  les menaces de telles actions, le harcèlement, la contrainte et la privation arbitraire de liberté» (Recommandation générale 35, paragraphe 14).

Le Comité considère la violence sexiste comme une forme de discrimination, en vertu de l'article 1 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979, CEDAW). L'interprétation juridique de la violence sexiste par le Comité comme violation des droits humains se trouve principalement dans les Recommandations générales 19 et 35.

La violence à l’égard des femmes, par exemple, le viol, la violence domestique, le harcèlement sexuel et les agressions, les châtiments corporels, et les pratiques néfastes telles que le mariage d’enfants (voir ci-dessus) et la mutilation génitale féminine peuvent empêcher les filles de se rendre à l’école pour une durée temporaire ou indéfinie. Les données recueillies par le groupe de la Banque mondiale (2015, p. 1) montrent qu’au Nicaragua, “63% des enfants de femmes victimes de violence ont dû redoubler et ont abandonné l'école en moyenne quatre ans plus tôt que les autres”. En Zambie, “les filles victimes de violence sexuelle avaient plus de difficulté à se concentrer sur leurs études, certaines ont été transférées dans d’autres écoles pour échapper au harcèlement, et d’autres ont abandonné l’école en raison d’une grossesse”.

La violence sexiste est souvent présente dans les écoles, connue sous le nom de “violence de genre en milieu scolaire”, que l'Unesco définit comme : “actes ou des menaces de violence sexuelle, physique ou psychologique perpétrés dans les écoles et leur environnement, résultant de normes et stéréotypes de genre, et imposés par des rapports de force inégaux” (2016, p.13). La VGMS peut souvent conduire à une sous-performance et / ou à un décrochage scolaire complet des filles.

La VGMS affecte généralement les filles sur le chemin de l'école, où il y a peu ou pas de supervision. Par exemple, au Japon, des étudiantes ont signalé avoir été agressées sexuellement dans les transports en commun (lien en anglais). Le Groupe de la Banque mondiale rapporte que les craintes des parents quant à la sécurité des filles au moment de se rendre à l'école ont un impact sur les taux de scolarisation des filles en Afrique, en Asie du Sud et au Moyen-Orient.

La VGMS se produit également dans les locaux scolaires, ce qui rend l'environnement scolaire dangereux et peu propice à l'apprentissage. Il peut être perpétré par les enseignants et les autres étudiants. Une enquête réalisée en Côte d'Ivoire en 2010 a révélé que 47% des enseignants ont déclaré avoir initié des relations sexuelles avec des élèves. Au Kenya, après la mise en place d'un service d’assistance confidentiel, plus de 1000 enseignants ont été licenciés pour avoir agressé des filles (lien en anglais), principalement dans des zones rurales pauvres. Des exemples de VGMS comprennent également le harcèlement par d'autres étudiants. La VGMS ne se limite pas à l'enseignement primaire et secondaire. Dans les universités et les facultés du monde entier, les étudiantes sont victimes de violence physique et sexuelle, notamment de viol, d'intimidation et de harcèlement. End Violence Against Women rapporte que 1 étudiante sur 7 au Royaume-Uni est victime d'une agression physique ou sexuelle grave pendant sa vie d’étudiante.

La VGMS se déroule de plus en plus en ligne, à travers les technologies numériques, comme par exemple les messageries instantanées et les réseaux sociaux. Les formes de cyberintimidation et cyberharcèlement liées au genre incluent l’envoi de photos inappropriées et la contrainte d’envoyer des images sexuelles.

La VGMS inclut également des attaques contre les filles accédant à l’éducation, motivées par “des craintes concernant le rôle potentiel de l’éducation comme catalyseur de la transformation sociale, culturelle, économique et politique” (HCDH, 2015, p. 4). Parmi les exemples principaux, on peut citer l’enlèvement de près de 300 écolières par Boko Haram, en avril 2014, dans le nord-est du Nigeria et la fusillade de 2012 contre la militante de l’éducation Malala Yousafzai par des talibans au Pakistan (p. 3, lien en anglais).

Le droit international en matière de droits humains interdit la violence sexiste dans tous les contextes, y compris dans l'éducation. Cela inclut les actes ou omissions des acteurs et des organes étatiques, tels que les autorités publiques et les fonctionnaires, ainsi que des acteurs non étatiques, par exemple les partenaires, les membres de la famille, les enseignants, etc. Les États ont des responsabilités spécifiques en vertu du droit en matière de droits humains qui varient en fonction de l'auteur de l'infraction et sont bien expliquées aux paragraphes 21 à 6 de la Recommandation générale 35 de la CEDAW.

Voir notre fiche d’informations juridiques pour les dispositions spécifiques de la législation nationale et internationale relative à la violence sexiste à l’égard des femmes.

Pour en savoir davantage, veuillez consulter les Orientations mondiales pour une lutte contre la violence de genre en milieu scolaire de l’Unesco et d’ONU Femmes (2016).  Veuillez également consulter le blog du Rapport mondial de suivi sur l’éducation Les enseignants jouent un rôle central dans toute réponse efficace à la violence sexiste liée à l’école (première partie et deuxième partie).

Un mauvais environnement scolaire peut dissuader les filles de se rendre à l’école et également avoir un impact négatif sur la qualité de l’éducation des filles. L’environnement scolaire fait référence non seulement à l’infrastructure physique des locaux scolaires mais aussi à l’environnement d’apprentissage plus général.

Selon le droit international en matière de droits humains, l’environnement scolaire ne doit pas porter atteinte au droit à l’éducation et il doit aussi contribuer aux objectifs de l’éducation et au droit à une éducation de qualité en créant un environnement inclusif et de qualité (voir les paragraphes 10, 19, et 22 de l’Observation générale 1 du Comité des droits de l’enfant).

Les obstacles courants concernant l'environnement d'apprentissage comprennent :

L'un des obstacles les plus importants à un environnement d'apprentissage inclusif et de qualité est peut-être le manque d'enseignantes, en particulier dans les pays à revenu faible et intermédiaire, ce qui est en soi une manifestation du manque d'accès historique à l'éducation et des stéréotypes sexuels néfastes relatifs au rôle des femmes. Un dossier de l’Unesco souligne (2008, p.2) que l'augmentation du nombre d'enseignantes a un impact positif sur l'éducation des filles, car :

  • dans certaines communautés conservatrices, les parents ne permettent pas à leurs filles d'être enseignées par un professeur de sexe masculin
  • la présence des femmes dans les écoles peut avoir un impact positif sur le maintien des filles à l'école et sur leur réussite
  • Au niveau de la politique scolaire, les enseignantes peuvent être les défenseuses des filles, en représentant leurs points de vue et leurs besoins, et en faisant la promotion d’un apprentissage plus adapté aux filles.
  • les enseignantes donnent des modèles nouveaux et différents aux filles, détruisant alors les stéréotypes sexuels néfastes

En ce qui concerne le cadre scolaire, des infrastructures inadaptées et insalubres, en particulier le manque de toilettes, de toilettes séparées par sexe, de vestiaires et d'accès à l'eau potable peuvent dissuader les filles d’aller à l'école. Le manque de toilettes et, en particulier, de toilettes séparées par sexe affecte à la fois les filles et les garçons, mais étant donné les besoins spécifiques des filles, l'impact est disproportionné pour les filles.

Les filles ont besoin de toilettes à des fins d'hygiène menstruelle, ce qui inclut l'accès aux produits sanitaires, sans quoi les filles manquent souvent l'école à cause des stigmates sociaux liés à la menstruation, et sont incapables de se concentrer pendant les cours, entre autres raisons. Par exemple, le Guardian signale que les filles de familles à faible revenu au Royaume-Uni manquent souvent l’école parce qu’elles ne peuvent pas s’acheter de produits sanitaires et n’en demandent pas en raison de la stigmatisation sociale liée aux menstruations (lien en anglais).

Dans les locaux scolaires, les toilettes, en particulier les toilettes non séparées par sexe, ont tendance à être celles où les filles sont les plus vulnérables à la violence de genre en milieu scolaire parce qu'elles sont souvent laissées sans surveillance.

La pauvreté est le plus grand facteur déterminant l’accès à l’éducation d’une fille. Selon le Rapport mondial de suivi sur l’éducation, dans toutes les régions, à l'exception de l'Afrique subsaharienne, les enfants issus de familles riches, garçons ou filles, fréquenteront probablement tous les niveaux de l'éducation de base. Cependant, les filles issues de familles pauvres d'Afrique subsaharienne, d'Afrique du Nord et d'Asie occidentale et d'Asie du Sud seront moins susceptibles que leurs homologues masculins de fréquenter l'école et ce manque de participation augmente au niveau de l'enseignement supérieur (2016, p.10)

Un certain nombre de facteurs contribuent à ce que les filles issues de familles pauvres ne puissent pas aller à l'école, le plus important étant le manque d’enseignement gratuit, en particulier pendant les années formatrices. Cela peut être dû au fait que les gouvernements ne disposent pas de cadres juridiques et politiques pour faire de l'éducation gratuite une réalité ou ils en ont mais ceux-ci ne sont pas mis en oeuvre efficacement, ou ne pas financés de manière adéquate, ou encore il peut y avoir une corruption détournant les ressources de l’usage auquel elles étaient destinées.

Le manque d'éducation gratuite entraîne une charge financière supplémentaire pour les familles, qui peut prendre la forme de frais de scolarité (ou d'autres frais directs) ou de frais indirects tels que les uniformes scolaires, les frais d'examen, la sécurité, le transport scolaire, etc. De tels frais sont un obstacle direct à la fréquentation scolaire de nombreuses filles, soit parce que les familles ne peuvent pas assumer ces coûts, soit parce que les coûts peuvent forcer les familles à choisir lequel de leurs enfants envoyer à l'école. Dans de tels cas, ce sont généralement les garçons qui sont favorisés en raison de la faible valeur sociale et économique accordée à l'éducation des filles. Pour atténuer cela, le droit international en matière de droits humains exige que les États garantissent un enseignement primaire gratuit et obligatoire, une éducation progressivement gratuite à tous les autres niveaux et des mesures ciblées pour les groupes présentant un risque de décrochage scolaire (par exemple, le transport scolaire pour les enfants vivant dans des zones rurales). Cependant, le droit en matière de droits humains néglige l'importance des soins et de l’éducation de la petite enfance (SEPE) / éducation préscolaire, gratuits et accessibles. Les SEPE ont des impacts positifs sur le développement de l'enfant et les interventions ciblées de SEPE «peuvent compenser la vulnérabilité et le désavantage, quels que soient les facteurs sous-jacents tels que la pauvreté, le genre, ...» (EFA Rapport mondial de suivi sur l’éducation pour tous 2007: Un bon départ, p. 113).

Pour plus d’informations sur les obligations des États en matière de droits humains, veuillez consulter notre page sur la gratuité de l’éducation.

Le manque d'éducation gratuite est étroitement lié aux priorités gouvernementales reflétées dans la politique budgétaire. Apparemment, en raison de la crise financière de 2008, les gouvernements ont tendance à réduire leurs dépenses relatives aux services publics, y compris l'éducation, en diminuant le montant qu'ils perçoivent grâce aux impôts. De telles mesures d'austérité ont eu un impact disproportionné sur les femmes et les filles, d'autant plus que ce sont les personnes les plus en marge de la société qui ont tendance à bénéficier des services publics.

L'une des conséquences de l'austérité et de l'incapacité des États à élaborer, mettre en œuvre, financer et imposer des cadres juridiques et politiques concernant la gratuité de l'éducation selon leurs obligations en matière de droits humains est la croissance des prestataires privés d'éducation. Ceci se produit principalement dans les pays à faible et moyen revenu mais le phénomène est de plus en plus observé dans les pays à revenu élevé (voir par exemple le Royaume-Uni, les États-Unis, et la Suède).

La privatisation de l’éducation pose plusieurs problèmes en matière de droits humains qui peuvent avoir des impacts négatifs sur l’éducation des filles, par exemple: elle peut encourager le désinvestissement dans l'éducation publique, éroder progressivement le système éducatif public et sa capacité à atteindre les plus marginalisés, particulièrement les filles handicapées, et les prestataires privés peuvent indirectement discriminer les filles en prélevant des frais qui ont un impact négatif disproportionné sur la participation des filles à l’éducation, en raison de la préférence donnée par les parents à l’éducation des garçons.

Le droit international en matière de droits humains impose aux États des obligations de veiller à ce que les prestataires privés ne portent pas atteinte au droit à l’éducation. Veuillez consulter notre page sur la privatisation de l’éducation pour plus d'informations.

Enfin, l'action mondiale pour lutter contre la pauvreté par le biais du développement durable s’est également concentrée sur l'inégalité entre les sexes et l'éducation. La communauté internationale, par le biais du Programme de développement durable à l’horizon 2030 a reconnu l'importance d'une éducation inclusive et de qualité (objectif 4 du développement durable) et de l'égalité des sexes ainsi que l'autonomisation des femmes (objectif 5 du développement durable) pour atteindre un développement durable et a adopté divers objectifs, cibles et indicateurs qui sont en grande partie alignés sur le droit en matière de droits humains. Veuillez consulter notre page Education 2030 pour plus d'informations. Voir également notre contribution au Rapport mondial de suivi sur l'éducation 2017-8 Évaluation sensible au genre (à paraître).

International

      Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (1979, article 10; Recommandations générales 19, 25, 28, 35, et 36)

      Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (1966, articles 2 et 13; Observations générales 13 et 16)

      Convention relative aux droits de l’enfant (1989, articles 2, 28 et 29; Observation générale 1)

      Pacte international relatif aux droits civils et politiques (1966, articles 2, 3, 24, 25 et 26; Observation générale 28)

      Convention de l’UNESCO concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement (1960, articles 1-4)

Afrique

      Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples (1981, articles 2 et 17)

      Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant (1990, article 11)

      Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique (2003, Article 12)

      Charte africaine de la jeunesse (2006, Article 13)

Europe

      Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales (1948); Protocole facultatif 1 (1952) et Protocole facultatif 12 (2000) (article 14 de la Convention, Article 2 du premier protocole et article 1 du douzième protocole)

      Charte sociale européenne (révisée) (1996, articles E, 7, 10 et 17)

      Recommandation relative à l’approche intégrée de l’égalité entre les femmes et les hommes dans l’éducation (2007)

      Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (2000, articles 14 et 23)

Inter-Amerique

      Protocole additionnel à la Convention américaine relative aux droits de l’Homme, protocole de San Salvador (1998, articles 13 et 16)

      Charte démocratique interaméricaine (2001, article 16)

Arabe

      Charte arabe des droits de l’homme (2004, article 41)

Pour plus d’informations, veuillez consulter Instruments internationaux - droit des femmes et des filles à l’éducation