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Chile representatives during the review by the CESCR in June 2015
© Sylvain Aubry
24 Juin 2015

Communiqué de presse

(Genève, 24 juin 2015) Deux groupes d'experts des droits de l'homme des Nations Unies (ONU) ont publié cette semaine des déclarations novatrices qui tirent la sonnette d'alarme sur l'augmentation et les conséquences de la privatisation de l'éducation au Ghana, au Chili et en Ouganda et ont émis des recommandations fermes pour traiter ce problème.

Les observations finales des groupes d'experts brossent un sombre tableau de l'évolution des systèmes d'éducation dans ces pays au cours des dernières années. Elles confirment que la privatisation non réglementée de l'éducation a tendance à se développer rapidement dans beaucoup de pays, particulièrement ceux à faible revenu, et s'apparente dans certaines instances à des violations de la législation internationale des droits de l'homme.  

Au Ghana, le Comité des droits de l’enfant (CDE) des Nations Unies se montre inquiet du fait que « l'enseignement privé se développe très rapidement, sans la supervision nécessaire des conditions de scolarisation, de la qualité de l’éducation fournie, et de la transparence et de l'efficacité dans la gestion des ressources d'éducation. »

En Ouganda, le Comité sur les droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) des Nations Unies se dit préoccupé de « l'accentuation de l'écart dans l'accès à une éducation de qualité qui résulte du développement de l'éducation privée et qui touche de manière disproportionnée les filles et les enfants de familles à faible revenu ».

Dans ses observations, le CDESC est allé jusqu'à affirmer que le système d'éducation au Chili, qui est l'un des  plus privés au monde est cause « de ségrégation et de discrimination entre les couches socioéconomiques »

Ian Macpherson, représentant de l'Initiative de recherche sur la privatisation de l'éducation (PERI) a réagi en affirmant : « Ensemble avec plusieurs organisations, dont le Réseau international pour les droits économiques, sociaux et culturels « Réseau-DESC »), le Projet Droit à L’éducation (« RTE »), et des partenaires nationaux, nous avons documenté depuis l'année dernière les dommages et les conséquences négatives sur les droits économiques et sociaux qui résultent de l'augmentation des prestataires privés de l'éducation ; de plus, il est indispensable que les experts des droits humains de l'ONU reconnaissent et traitent cette question. »  

Les comités des Nations Unies ont professé des recommandations fermes pour répondre au problème. Le CRC a recommandé que le Ghana « évalue et remédie aux conséquences du développement rapide de l'éducation privée […] et son impact sur le plein exercice du droit des enfants à l'éducation […] et garantisse une réglementation et un suivi effectifs et efficaces des prestataires privés de services éducatifs »

Dans l'analyse de l'Ouganda, le CDESC a rappelé que les États « assument la responsabilité principale de la fourniture d'une éducation de qualité à tous les enfants » et a recommandé que l'Ouganda « renforce les réglementations et développe des mécanismes de suivi et de supervision des établissements privés ».

Au Chili, le CDESC a salué les réformes menées par le gouvernement et a recommandé qu'à l'avenir il « prenne toutes les mesures nécessaires pour éliminer les fortes disparités qui frappent actuellement la qualité de l'éducation entre les écoles privées, subventionnées et publiques, et qu'il s'assure également que toutes les écoles disposent des infrastructures appropriées et d’enseignants formés et qualifiés ». 

Sylvain Aubry, du Réseau-DESC, a insisté en ajoutant : « Ces conclusions du CRC et du CDESC sont révélatrices du tort que cause bien trop souvent la privatisation de l'éducation. Le fait que des experts internationaux reconnaissent que la privatisation dans l'éducation crée une ségrégation socioéconomique, comme au Chili, et que les États se trouvent dans l'obligation légale de fournir une éducation de qualité ainsi que d'évaluer et de remédier aux conséquences de cette privatisation, constitue une étape importante du réexamen du rôle des acteurs du secteur privé dans l'éducation dans le cadre des droits humains ». 

Delphine Dorsi, du Projet Droit à l'éducation, a souligné également que : « La publication de ces conclusions arrive à point nommé, car le Conseil des droits de l'homme discute actuellement du dernier rapport du Rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l'éducation, M. Singh, qui analyse la tendance vers la commercialisation de l'éducation et la manière dont le secteur privé est de plus en plus préconisé comme solution dans les négociations actuelles sur les futurs objectifs de développement durable. Nous espérons que les États recourront à ces analyses pour cesser de promouvoir la privatisation dans l'éducation et pour réglementer les prestataires privés de l'éducation conformément à la législation sur les droits humains ». 

Toutes les conclusions récentes des groupes d'experts de l'ONU sont disponibles dans un document publié aujourd'hui par le Réseau-DESC, dans lequel sont récapitulées les principales observations finales des organes de surveillance des traités relatifs aux droits de l'homme de l'ONU concernant la privatisation dans l'éducation.

 

FIN

 

Notes 

Le CRC et le CDESC sont deux organes de l'ONU composés de 18 experts indépendants qui suivent la mise en œuvre par les États parties de la Convention relative aux droits de l'enfant et du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, respectivement.  Tous les États qui ont ratifié ces traités sont tenus de faire parvenir régulièrement des rapports aux comités compétents sur la manière dont les droits sont appliqués. Les comités examinent chaque rapport et communiquent leurs préoccupations et recommandations aux États sous la forme d'« observations finales ».

 Documents

  • Le résumé des dernières observations finales des organes des droits de l'homme des Nations Unies est disponible sur : http://bit.ly/1QPZmlz
  • Le dernier compte-rendu du rapport du Rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l'éducation relatif à la commercialisation de l'éducation est disponible sur : http://bit.ly/1CsI569
  • D'autres documents sont disponibles sur : http://bit.ly/1ALhcIY

 Contacts

Sylvain Aubry

Conseiller juridique et stratégique

Réseau international pour les droits économiques, sociaux et culturels

sylvain@globalinitiative-escr.org

 

 

 

Ian Macpherson

Initiative PERI de recherche sur la privatisation de l'éducation

info@periblobal.org  

Delphine Dorsi

Coordinatrice exécutive

Projet Droit à l'éducation

delphine.dorsi@right-to-education.org